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Sur le tournage de Le Grand Vent de Valérie Liénardy

Publié le 01/03/2004 par Jean-Michel Vlaeminckx / Catégorie: Tournage

« Lorsque les événements vous échappent. Feignez de les organiser ! »

Proverbe

Champ

Le Grand Vent de Valérie Liénardy

 

Le cinéma est un shoot nous confiait récemment Diego Vignatti Martinez. Nous en avons fait, une fois de plus, l'expérience sur le tournage du Grand Vent, un court métrage de Valérie Lienardy. Après le fatal « Action » prononcé par la réalisatrice, la vie du film se capte au fil des plans. Le silence, hormis la voix des acteurs, est total. Une vingtaine de personnes sont figées comme des fantômes aux aguets. Coupez ! L'adrénaline retombe jusqu'à la prochaine prise. Lorsque pour des raisons d'horaire (une comédienne devant rentrer à Bruxelles pour jouer au Théâtre, le soir) le temps imparti est calculé et que les prises s'accumulent pour diverses raisons (perche dans le champ, chevauchement des répliques, le jeu plus tranchant que prévu d'un acteur) la tension sur le plateau arrive à une intensité que certains réalisateurs recherchent. Chaque prise devient un shoot. Et, votre serviteur observe, tel une momie de Tardi, les évolutions d'un plateau en folie, entre chaque plan, remarquant au passage que Sammy Fransquet, l'assistant et Anthony Rey, le producteur, calment le jeu au maximum. Que les prises se succèdent et que les répétitions théâtrales de la comédienne prennent du retard, est logique lorsqu'on est une réalisatrice méticuleuse et que l'on désire travailler davantage sur l'émotion des comédiens que dans l'imagerie du clip. Si pour couronner le tout, Antoine Duquesne, le chef op. et cadreur du film surveille le hors-champ et les bords du cadre avec soin vous comprendrez que le bateau tangue. La prochaine fois qu'un casse-pied prétend que le cinéma est un métier pour traîne-savates (« les artistes ») envoyez le paître. Votre serviteur est rentré à Bruxelles, lessivé de sa chevauchée fantastique à Quevaucamps! Sachez que le lendemain la plupart des membres de l'équipe se levait, quant à eux, à cinq heures du mat.

 

Contre-champ

 

Le Grand Vent de Valérie Liénardy

 

La scène complexe au niveau de l'émotion que les comédiens devaient vivre, et à laquelle nous avons assisté, était un face à face entre Antoine (Pierre Boulanger) et sa mère (x). Il ouvre la porte de la cuisine. Au passage sa mère lui dit : « Vas te coucher, tu es fatigué. Ton père a pris un somnifère, tu en veux un ? » Geste brutal d'Antoine qui se dégage de l'emprise maternelle et réplique sèchement : « Laisse-moi » ! « Antoine ! » Celui-ci quitte la cuisine et s'engage dans le couloir en criant : » Je n'en veux pas de ta merde ! » et sort en claquant bruyamment la porte derrière lui.

 

Valérie

C'est le second film de Valérie Lienardy qui avait tourné, il y a quelques années Papier glacé, un court métrage de 13' narrant les aventures d'une fille désirant, rêvant d'être un Top model.. « Le Grand vent est l'histoire d'un jeune homme qui perd son frère dans un accident de moto » nous explique la réalisatrice. « Le film se passe pendant la journée de l'enterrement du frère. Antoine, est un adolescent révolté, qui ne supporte pas le rituel qui entoure la mort de son frère. Le film adopte son point de vue, ses émotions, le fait qu'il veut fuir l'événement. Il n'arrive pas à communiquer avec ses parents. Ils ne sont pas sur la même longueur d'onde au niveau des émotions donc il est un peu à bout de nerf. D'autant plus qu'il essaie de donner de lui l'image d'un homme fort et non d'un adolescent. Au début il y arrive, reste impassibl,e mais à la fin, il se dispute avec sa mère et s'enfuit dans la forêt. L'enjeu du film est de suivre le personnage dans sa douleur, ses doutes. Avec des choses assez simples, j'essaie de créer de l'émotion. Les bouleversements que provoquent la perte d'un être cher dans une vie d'adolescent. Quant on a 16 ans et un frère qui meurt dans un accident c'est un choc. On a l'impression que la viei s'écroule. Tous les espoirs qu'on avait placés dans l'avenir sont anéantis ». L'émotion de la réalisatrice est telle que nous supposons, ce qu'elle confirme, qu'il s'agit d'une expérience qu'elle a vécue.

 

Anthony

Il sort d'une expérience dont nous vous avons parlé, le tournage en autoproduction de White End de Vincent Lanoo tandis que Le Grand vent est une production soutenue par la Communauté française. « Cela reste complexe, nous précise-t-il, d'abord parce que les budgets ont été rabotés de 20% et en second lieu, parce que Helicotronc est une petite maison de production qui n'a pas de fonds de roulement. Mais effectivement, on va faire Le Grand Vent avec davantage d'argent que White end de Vincent Lanoo. C'est assez paradoxal. Mais c'est aussi intéressant et motivant. Vous avez remarqué que les gens d'une équipe se retrouve souvent dans l'autre. Dans l'idéal j'aimerais créer un esprit d'équipe. En entrant à l'INRACI, j'avais repéré Papier glacé, le film de fin d'études de Valérie Liénardy. Il sortait du lot par rapport aux autres films présentés. Il a d'ailleurs reçu pas mal de prix. J'ai fait la connaissance de Valérie et nous avons présenté, il y a deux ans, Un Amour de porcelaine, qui a failli passer à la Commission de sélection du film. Le scénario était vraiment bien, mais plutôt que de le retravailler, elle a préféré revenir, un an plus tard, avec Le Grand vent. Pour ce qui est de nos projets, il y a le prochain long métrage de Vincent Lanoo : Alice en voiture. »

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