Adieu Richard, la famille du cinéma belge deviendra bien sage sans toi
Puis-je avouer sans trop vous fâcher que je n'en suis toujours pas revenu, vous qui m'avez boudé depuis la nuit des temps et dont la sourde oreille était la seule que vous me prêtiez habituellement dans vos colonnes cinergitiques.
J'ose espérer que vous n'aurez pas le mauvais esprit de "sucrer" ce début quelque peu inhabituel mais je n'ai pas pour habitude de dire ni d'écrire la langue de bois et j'aime assumer mes "incendies" jusqu'à l'extinction des feux.
Quant à ce texte que vous sollicitez auprès de cent cinéastes de ce pays ( j'ai failli écrire SANS), j'aimerais m'y compter comme le 37ème car ce fut là mon triste numéro dans un sinistre pensionnat derrière les murs duquel je faillis périr d'un ennui plus que mortel, de cet ennui que seuls réussissent à dispenser quelques poignées de petits frères-professeurs masturbés jusqu'à l'hostie.
Un jour pourtant j'y découvris mon premier spectacle théâtral monté et joué par les "grands", ce fut Seul Maître après Dieu de l'écrivain néerlandais Jan De Hartog. J'y crus si fort, si intensément, j'en fus si impressionné que durant les jours suivants dans la cour de l'école durant les récréations j'y jouai à moi tout seul tous les rôles à commencer par celui de la tempête au cours de laquelle disparaissait le navire avec tout son équipage. Et voilà, le tour était joué. J'avais trouvé mon médicament, mon remède homéopathique, mon refuge.
Les portes du spectacle de ce Monde s'étaient ouvertes et les études à faire présentes et futures allaient rapidement s'avérer autant d'obstacles, autant de barrières à m'empêcher de rejoindre le monde de l'imaginaire. C'est vous avouer si je fus "mauvais élève" et rebelle à tout enseignement excepté celui que je m'étais choisi, et même les études entreprises plus tard à l'I.A.D. ne me convinrent pas mis à part l'enseignement de quelques rares professeurs, mes pères et amis, Julien Bertheau, Maurice Sévenant, Pierre Laroche...
Avant de terminer d'écrire cette brève confession, je voudrais ajouter la chose suivante. Lorsque j'étais enfant je vivais chez mes grands-parents. Des gens simples, des gens braves qui m'avaient recueilli chez eux. Je me le rappelle et je me le rappellerai toujours : le soir avant de m'en aller me coucher, ma grand-mère, Sophie, me prenait sur ses genoux et me racontait les histoires de Moustache et de Monsieur Subito lesquelles étaient dessinées en trois ou quatre images et paraissaient quotidiennement dans Le Soir et La Dernière Heure, les deux journaux que lisait mon grand-père. Ces images m'apprirent l'humour, me familiarisèrent avec la drôlerie, elles me donnèrent le goût et le sens du gag, bref, elles m'aidèrent à grandir et me permirent d'affronter le sourire au coeur les tempêtes des nuits et des jours à venir.