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Alberta’s Room de Victoire Karera Kampire

Publié le 16/11/2023 par Nastasja Caneve / Catégorie: Critique

La mer, travelling arrière. Un rideau blanc, un intérieur, une voix qui murmure et tapisse les murs d’un « Mother, mother, mother ». Une lampe, des photos, un lit. La caméra détaille une chambre, objet après objet. Une femme, de dos, allume une bougie, on ne sait ni qui elle est ni où nous sommes.

Alberta’s Room de Victoire Karera Kampire

Cette femme, c’est Alberta. Alberta Gay, la mère de Marvin Gaye. Dans sa chambre, une télévision avec des images d’archives. Elle, embrassant son mari. La scène se répète, le jour fait place à la nuit, la nuit au jour, la caméra refait le tour. Des cris, des criquets. Et pan, one shot, le Christ tombe, son fils est mort.

La jeune réalisatrice Victoire Karera Kampire, récemment diplômée de la LUCA School of Arts en arts audiovisuels, s’empare de la question d’un deuil non résolu, celui d’une mère pour son fils, celui d’Alberta pour Marvin, assassiné par son père après une dispute familiale la veille de son 45e anniversaire.

Le film nous plonge dans la chambre/tête d’Alberta, dans ses rêves et ses cauchemars, un univers en noir et blanc, pas de vue d’ensemble, seulement des plans rapprochés sur des objets, des formes, des textures, des morceaux de femme, une femme en mille morceaux, des vidéos d’archives. Des voix résonnent, celle de Marvin qui parle et qui chante, celle de l’officier de police chargé de l’enquête, des sons du dehors, des sons du dedans.

Entre film expérimental, film familial, film historique, Alberta’s Room est à la croisée des genres. Il mêle onirisme et réalité, il mélange le jour et la nuit, les cris, les rires, les pleurs. Victoire Karera Kampire ne raconte pas seulement la disparition tragique de cette icône musicale, elle change de point de vue et raconte cette tragédie depuis les yeux d’une femme, d’une mère qui éprouve l’absence d’un fils qui est mort sous ses yeux le 1er avril 1984.

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