Cinergie.be

Benoît Debie, directeur photo

Publié le 05/05/2006 par Anne Feuillère / Catégorie: Entrevue

En 2002, Irréversible de Gaspard Noé est sélectionné en compétition officielle à Cannes et le film entraîne scandales, vomissements et hourras. La photographie du film, elle, toute en ambiance crépusculaire et saignante en lumière radieuse ou en contraste urbain fait l'unanimité. Derrière la caméra, Benoît Debie se tient tranquille. Il vient de travailler comme chef opérateur sur son premier long métrage de cinéma, et si c'était "inespéré", il ne se dit pas pour autant que sa carrière au cinéma est lancée. Quatre ans plus tard, le voilà détrompé et hissé, tambour battant, vers le succès.

Il vient de terminer le film d'Albert Dupontel, Enfermés dehors, son cinquième long métrage pour le cinéma, un autre film aux Etats-Unis, et s'apprête à repartir aux quatre coins du monde. Rencontreentre Los Angeles et New York, avec un super efficace posé, un ultra boulimique réfléchi, un génie des couleurs qui sourit à ses muses.

Cinergie : Tu as signé la lumière sur quelques longs métrages de cinéma mais tu as déjà une longue carrière derrière toi car tu as commencé à la télévision ?
Benoît Debie : A vrai dire, j'ai un parcours plutôt atypique. Je n'avais rien à faire là (rires). J'ai fait mes humanités et, à 18 ans, j'ai dû chercher un métier, comme tous les étudiants. C'est assez étonnant parce que je suis allé voir un conseiller d'orientation un peu par hasard et il m'a donné quatre pistes : les écoles artistiques et le cinéma - choses auxquelles je n'avais pas du tout pensé - , architecte d'intérieur, garde champêtre et prof d'éducation physique (rires). C'est absurde parce que je ne me vois plus garde champêtre à l'heure qu'il est, mais c'est vrai que j'adore la nature. Quant à l'éducation physique, j'aime ce qui bouge. Enfin, mon père est architecte, et cela me passionne. Il aimait aussi la photo et m'avait acheté un appareil : depuis tout petit, je m'amusais avec. Mais cela ne m'était pas venu à l'esprit d'être photographe. Toujours est-il que je suis allé à l'IAD lors d'une journée porte ouverte, j'ai halluciné et je me suis dit : "Mais voilà, j'adore". J'ai choisi sans savoir que ce serait ma passion.

C. : Avec qui as-tu travaillé en sortant de l'IAD ?
B. D. : Avec les frères Dardenne sur Je pense à vous, et avec Manu Bonmariage comme assistant caméra. Ce n'est pas toujours évident quand on est jeune et qu’on doit travailler avec des gens qui ont une personnalité forte. Et puis, la technique des frères Dardenne, qui fonctionne très bien, leur est très particulière. C'est très astucieux de répéter des heures avec les comédiens, puisque leur cinéma repose sur les acteurs (ce qui rend leurs films si intéressants), mais pour une équipe technique, cela devient très lourd. Nous arrivions sur le tournage à 7 heures du matin et ils s'enfermaient avec les comédiens pendant des heures… La journée de tournage commençait bien plus tard. On passe la journée à attendre pour ensuite aller très vite parce qu'il faut boucler le planning…. En tous les cas, je me suis rendu compte que ce n'était pas mon truc. Je ne regrette pas du tout ces expériences, mais je me disais qu'en suivant un schéma classique, j'allais rester assistant dix ans, puis faire un peu de cadre, pour finir chef opérateur en fin de carrière. Tout en sachant qu'en Belgique, comme il n'y a pas beaucoup de films, tu n'as pas beaucoup de chances d'y arriver ! Alors je me suis dit "Oh là là…, ce n'est pas ce que je veux !". Mon rêve était de faire de l'image, de la photo. À ce moment-là, RTL cherchait des cadreurs. J'ai pensé : "Plutôt que de m'emmerder (rires), je vais travailler à la télé." J'ai fait quelques caméras, j'aimais bien le cadre mais je ne m'éclatais pas non plus. Je gagnais ma vie, j'essayais aussi de garder un pied dans le cinéma en même temps. Et puis, assez vite, j'ai fait la lumière sur des plateaux, des conceptions d'habillages, des émissions de plus en plus importantes. J'avais 23 ou 24 ans, c'était assez inespéré. Cela m'a vraiment fasciné, j'adorais ça, j'ai énormément appris.

C. : Tu as pu expérimenter et t'essayer à tout à ce moment-là ?
B. D. : Oui. Je ne sais pas ce qu'il en est aujourd'hui, mais à ses débuts, RTL nous laissait très libres. J'ai tout appris de mon métier là et j'en ai de très bons souvenirs. J'ai moins travaillé au cinéma à cette époque car ce sont deux secteurs assez différents, mais je faisais quand même des pubs, des clips, des petits courts métrages, parce que j'aimais ça. Cela dit, à la fin, j'étais fatigué. J'avais le sentiment de ne plus avancer, d'avoir fait le tour. J'ai essayé de faire de plus en plus de choses en parallèle. J'ai rencontré Fabrice du Welz, qui travaillait aussi à la télévision, et j'ai fait son court métrage, Quand on est amoureux, c'est merveilleux. Un an après, Gaspard Noé l'a vu et m'a demandé de faire son film. C'était génial et totalement inattendu mais je ne me suis pas dit "ça y est, ma carrière au cinéma est lancée". J'ai donc travaillé sur Irréversible tout en étant à RTL. Puis, tout s'est enchaîné et j'ai quitté la télé. C'est étonnant comme tout est parti très vite… Je ne fais même plus de vidéo… Oui, c'est très étonnant, c'est un parcours très atypique (rires). En tout cas, après avoir travaillé non-stop tous les jours à la télévision pendant 10 ans, je n'ai pas eu trop de difficultés à travailler sur Irréversible. Il fallait reconstruire un univers de lumière très particulier, ça, c'était difficile, mais la lumière n'a jamais été un problème finalement, même sur les films suivants. Quand je travaillais pour la télévision, des proches me disaient que je m'enterrais, que j'étais trop doué pour rester à la télé. Mais un chef opérateur m'a dit "Benoît, tu vas faire de l'image et essayer des choses tous les jours, tu vas connaître la lumière de chaque projecteur par cœur, savoir exactement lequel tu dois placer et à quelle distance pour obtenir tel effet. Un chef opérateur qui travaille au cinéma ne travaille pas tous les jours. Et finalement, tu t'y connaîtras bien mieux." Et c'est comme ça : plus tu travailles, plus tu connais ton outil et plus tu es apte à expérimenter. Le plus dur, c'est de rentrer dans l'univers du cinéma, des réalisateurs. Si tu travailles avec Dario Argento, il n'y a rien à faire : c'est Dario Argento (rires) !

C. : Est-ce que tu n'es pas un peu devenu "le" directeur photo qui n'éclaire pas ? !
B. D. : C'est que tout a commencé avec Gaspard qui avait deux demandes bien spécifiques sur Irréversible. Il ne voulait pas de projecteurs de cinéma pour pouvoir faire des plans à 360° – ce qui est impossible avec des projecteurs dans le champ. Il voulait aussi que son film ressemble le plus possible à un fait-divers, avec une image naturelle qui ferait oublier la caméra mais qui devait être forte. Il m'a contacté après avoir vu le court métrage de Fabrice, dont l'image était naturelle mais typée. C’est ce qu'il voulait… mais sans lumière (rires) ! J'ai donc dû reconstruire une toute nouvelle approche de la lumière, ce qui est plutôt rare sur un long métrage. Nous n'avons pas utilisé des projecteurs de cinéma mais des lumières naturelles dans le champ. Des ampoules au sodium en plus grand nombre me servaient de projecteurs dans les appartements ou les rues. J'ai beaucoup travaillé avec la déco pour faire un habillage lumineux. Suite à ces contraintes sur Irréversible, j'ai compris qu'il y avait moyen d'éclairer autrement. Ce n'est pas pour autant que je n'utilise plus de sources, attention ! Les producteurs se disent : "Il est bien Debie, il ne coûte pas d'argent, il est rapide, il éclaire sans projecteurs", ce n'est pas vrai, j'adapte ma technique aux films, aux réalisateurs, à des choix esthétiques, des envies, des contraintes… Si j'éclaire peu au tournage, tout est prévu en amont. Je travaille beaucoup avec le chef déco, pour penser la brillance des murs, les couleurs, la place des appliques, etc. Mon travail dépend aussi sur le plateau de la phase de l'étalonnage numérique. Si certaines choses peuvent être créées plus tard, il n'est pas forcément nécessaire de les avoir à la prise de vue. Sur Innocence, ça a été une étape importante pour aller chercher des couleurs, faire des nuits un peu crépusculaires. Avec ces petites filles, on ne pouvait pas tourner de nuit. Il a donc fallu créer ces atmosphères du soir, faire un travail de retouches d'images. Lucile Hadzihalilovic, la compagne de Gaspard, m'avait demandé de travailler un peu de la même manière que pour Irréversible : nous n'avons travaillé qu'avec le soleil, en utilisant des réflecteurs, des miroirs, pour n'utiliser que cette lumière et la renvoyer là où nous avions envie qu'elle soit. C'était encore un travail tout à fait différent. Irréversible était un film urbain, de nuit et Innocence se tournait dans la campagne, sans lumière moderne. Calvaire, était un mélange de ces deux approches, sans sources de lumière de cinéma directe, tout venait par les fenêtres. Nous avions fait beaucoup de tests de développement de pellicule en amont pour savoir comment j'allais exposer le film au tournage. À la manière des films de Clint Eastwood, tout était très contrasté.

C. : Chaque film a été une nouvelle expérience alors ?
B. D. : C'est ça qui est bien. Les metteurs en scène que je rencontre ont des exigences, des folies, des rêves à chaque fois différents et extrêmes. C'est donc aussi pour moi un nouveau défi car je dois essayer de créer, d'inventer un autre système, des astuces. Et comme je m'ennuie très vite, que je n'aime pas faire deux fois la même chose, c'est toujours excitant. Refaire la même chose parce que ça marche bien ne m'intéresse pas… On me dit que je fais beaucoup de films noirs, de films de genre mais je ne crois pas. Innocence est un film d'atmosphère, Enfermés dehors est un cartoon à la Tex Avery. Et puis je ne veux pas être Benoît Debie et faire ma lumière. Je suis là pour m'éclater bien sûr, mais avant tout, pour faire un film et servir un univers, un réalisateur. Il y a des chefs opérateurs qui se foutent du film. Ce n'est pas une histoire qu'ils veulent raconter, mais leur lumière. Un film n'est pas une démonstration technique. Je suis convaincu, par contre, que la lumière peut être un personnage à part entière. C'est ce qui est compliqué : faire ta lumière tout en faisant attention à ce qu'elle ne prenne pas le dessus sur l'histoire. C'est la même chose pour les décors ou le son… Je crois qu'un film est un ensemble de choses qui doivent fonctionner et je suis très vigilant là-dessus. C'est dramatique, je trouve, qu'un metteur en scène se foute que l'image soit jaune, verte ou blanche…

C. : Tu travailles ta lumière comme un peintre ?
B. D. : On me dit ça, oui. Mais tout en ne connaissant pas la peinture. On me demande souvent mes références cinématographiques ou des chefs opérateurs qui m'influenceraient, mais en fait, je n'en ai pas. C'est plutôt la vie de tous les jours qui me marque. Quand je fais un film, je ne me dis pas que je vais refaire la lumière de tel ou tel chef opérateur ou de tel film, mais plutôt la lumière que j'ai vue à tel moment dans la rue ou à tel endroit. J'aime bien faire des photos de voyages, garder des visuels qui me marquent très fort. J'engrange des idées, des impressions, et si l'occasion se présente, j'y reviens. Sur des photos très compliquées faites grâce à des retouches chimiques, je me demande par exemple comment faire ça au cinéma.

C. : Et ton travail avec Dario Argento sur The Card Player ?
B. D. : C'était encore une autre expérience. En Italie, tu sais, on l'appelle "Il Maestro" : c'est un grand maître dans son art. Il connaît par cœur son métier. C'était très enrichissant pour moi parce qu'il a travaillé avec les plus grands chefs opérateurs du monde, Vittorio Stroraro, Giuseppe Rotuno, Ronnie Tyler… Il va chercher, je crois, la personne qui lui correspond par rapport au film qu'il veut faire. Et dans mon cas, il cherchait, à ce moment-là, un chef opérateur qui donnerait une image plus moderne à son film. Il a fait des films magnifiques comme Suspira, avec une image très riche, très baroque, très théâtrale. Mais il voulait ici quelque chose de plus actuel, de plus urbain. Il avait vu Irréversible et le court métrage de Fabrice. Il est parti sur moi, ce qui était peu probable...Ce qui est assez étonnant avec lui, c'est qu'il doit avoir 65 ou 67 ans et qu'il a toujours cette passion pour son métier et cette envie d'expérimenter. Un jour, en préparation, il m'a dit "Vas-y, Benoît, tu sais, moi, j'ai tout fait, j'ai eu des bons et des mauvais acteurs, des bonnes lumières et des mauvaises, j'ai tout eu alors essaie, fais ce que tu aimes."… C'était une très belle expérience pour moi. Il pourrait être mon père, il connaît le métier comme je ne le connais pas. Et curieusement, il a été très attentif à mon travail, à ce que je pouvais lui dire. Il me demandait mon avis, il était à l'écoute.

C. : Les réalisateurs forment souvent avec des chefs opérateurs des sortes de couples…
B. D. : Fabrice, qui est très cinéphile me le faisait remarquer : il y a beaucoup de réalisateurs qui ont un univers très fort et qui ont derrière eux un chef opérateur. Il y a une grande complicité, oui. Quand tu travailles avec des gens que tu connais bien, tu peux aller plus loin, essayer des choses plus folles, prendre plus de risques dans ton travail parce que l'autre te fait confiance. Fabrice m'avait montré des choses, des visuels qui lui plaisaient pour Calvaire, et il m'a totalement laissé faire. C'est cela qui est bien, qu'on me permette d'aller loin, d'expérimenter. Avec d'autres, j'aurais tendance à rester plus sage. Je fais très attention maintenant que j'avance dans mon travail, à bien cerner les projets, pour cette raison. Sans osmose entre un chef opérateur et un réalisateur, le film n'en est pas moins bon pour autant, mais est-ce que les deux sont au summum de leur capacité ? Et puis, c'est tellement d'investissement que je ne peux pas venir deux jours sur un plateau pour repartir sur un autre. Je ne vois pas mon travail comme ça. Cette année où j'ai fait trois films d'affilée, Innocence, Calvaire, et celui de Dario, des films très denses donc, j'ai dû me donner énormément, et ça a été très dur pour moi, j'en pouvais plus. Je me suis rendu compte que je ne voulais pas travailler comme ça. Ou alors il faut se dire qu'on s'en fout, qu'on gagne sa vie, mais ce n'est pas du tout ce que je veux faire. Je n'ai pas envie de faire 150 films dans ma carrière dont 80 que je n'aimerais pas. Je préfère me donner à fond sur 10 films. Je fais des choix plus artistiques que financiers.

C. : Est-ce que tu t'occupes aussi du cadre quand tu travailles à la lumière ?
B. D. : En général, oui, mais parce qu'on me le demande. Et j'adore faire les deux, je me trouve plus fort. C'est par contre, très dur, horrible, cela demande une énergie folle (rires) ! Je dois alors me réfreiner et faire des choix en fonction du bon déroulement du film. Albert Dupontel voulait que je fasse les deux. Mais il y avait 3 caméras en permanence, on tournait 35 plans par jour, il y avait des grues, le cadreur était à 40 mètres du sol… Je ne pouvais pas être en hauteur, suspendu à une grue et diriger mon équipe au sol à la lumière.

C. : Et comment tu envisages cette période qui s'annonce du tout numérique ?
B. D. : Curieusement, ayant pratiqué la vidéo pendant tant d'années, je connais très bien les deux supports, j'y suis préparé, et le mélange des deux me fascine. Cela m'amuse beaucoup de mélanger films et numériques, de chercher des alchimies, des looks visuels, que tu ne trouves ni dans l'un ni dans l'autre, pour donner des choses très étonnantes. J'ai déjà fait mes petits tests, des bains alchimiques particuliers, avec un étalonnage numérique qui en tienne compte. Ce genre de test influence aussi les lumières pendant le tournage. J'ai un peu essayé sur Enfermés Dehors, j'y pense pour le prochain de film de Fabrice que nous allons tourner en Thaïlande, et aussi pour le long métrage de Marylin Manson.

C. : C'est pour ce film que tu étais à Los Angeles ?
B. D. : Oui. Manson va tourner son premier long métrage dans lequel il va jouer. Il veut faire un film très visuel, très particulier. Il cherche des choses qui n'existent pas. Dalsa vient de sortir une nouvelle caméra prototype en 4 K. Ils n'ont encore jamais fait de films avec et nous avons donc fait des tests. Et c'est super impressionnant (rires). J'ai vu la chaîne numérique, de la captation à la projection sur un écran de cinéma. Je suis tombé par terre ! Je n'en revenais pas. Il n'y a plus aucun grain dans l'image, c'est tout lisse, un peu en trois dimensions. C'est très étonnant. Ce n'est plus du tout la même image que du 35 mm, c'est autre chose. Ce n'est pas mieux, c'est autre chose. Pour le moment, la HD classique est toujours moins bonne que la caméra 35. Ce que je viens de voir à Los Angeles par contre est aussi bon, mais totalement différent. Cela dit, la caméra dont je  parle, est énorme. Elle est reliée par un câble monumental aux disques durs qui sont de véritables armoires. Ce n'est absolument pas ergonomique. Mais ça va le devenir...

C. : Tu viens de terminer un film qui s'appelle Day Night Day Night qui vient d'être sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs du prochain festival de Cannes. De quoi s'agit-il ?
B. D. : C'est un film américain tourné à New York. La jeune réalisatrice avait fait un documentaire très prenant sur la souffrance de sa mère après la mort du père. Day Night est son premier long métrage de fiction. Il s'agissait d'un film d'auteur, avec un budget limité et une petite équipe. C'était mon premier film aux États-Unis et c'était intéressant parce que c'était une première approche américaine en douceur, qui m'a permis de voir comment les équipes travaillent, de me familiariser avec la langue, toutes ces choses. Il s'est passé une histoire assez bizarre : quand Irréversible est sorti aux États-Unis, on m'a contacté pour faire l'image de Collatéral de Michael Mann. Cela me paraissait totalement invraisemblable. Finalement, ils ont choisi un américain pour le tourner. Ce qui, avec le recul, me semble normal : il s'agit d'une énorme production, avec de grosses structures derrière, Tom Cruise à l'affiche… En le voyant, je me suis dit que c'était tout à fait à ma portée. Mais, par rapport à une carrière, je ne crois pas que ce soit un film que tu puisses faire après deux ou trois longs métrages. Il faut être un peu plus installé dans le système, peut-être simplement pour pouvoir affronter les gens, gérer des agents, travailler avec ces acteurs.

C. : Quelle impression tu as eu des Américains ?
B. D. : Aux États-Unis, le cinéma est une industrie. Chaque personne a sa fonction et tout le monde est très efficace. Tu as un pouvoir sur un plateau assez étonnant : tu es chef opérateur, si tu dis quelque chose, c'est comme ça... Tu n'as pas besoin de demander deux fois la même chose, et les gens avec lesquels tu travailles sont très précis. Il y a une rigueur différente. Ici, chacun met un peu la main à la patte : c'est plus souple, plus artisanal. Mais c'est aussi parfois plus fatigant. Dans l'industrie hollywoodienne comme celle d'un Michael Mann, il faut avoir un esprit particulier, être très rapide, savoir exactement où on va, être assez sûr de soi. Je pense que c'est très bien que les choses aillent doucement pour moi justement pour toutes ces raisons-là.

C. : Tes projets s'accumulent désormais, non ?
B. D. : Mais oui, j'ai 10 films là qui arrivent. Il y a d'abord un film de George Ratliff, Joshua, l'histoire d'un petit garçon, une sorte de thriller psychologique qui va se tourner à New York, le film de Marylin Manson cet été, Fabrice en fin d'année en Thaïlande. Carole Laure réalise son troisième long en septembre, à Montréal. Un film français dans le désert, au Maroc, un autre de Jean-Michel Roux. Et comme j'ai un agent aux États-Unis, j'ai des projets, notamment un film au Nouveau-Mexique. Et là, j'ai une pile de scripts, je ne les ai même pas tous lus (rires). Mais le Marilyn Manson me fascine tout particulièrement. Je sens que cela sera passionnant visuellement.

Tout à propos de: