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Fils de plouc de Lenny et Harpo Guit

Publié le 10/09/2021 par Kevin Giraud et Vinnie Ky-Maka / Catégorie: Entrevue

Parisiens tombés amoureux de Bruxelles, Lenny et Harpo Guit déboulent dans le petit monde du cinéma belge avec Fils de plouc, avec le support du programme de production légère de la Fédération Wallonie Bruxelles, et une sélection à Sundance en poche. Rencontre avec ces deux “nouveaux frères” du cinéma belge comme certains les appellent déjà en coulisses, dans le cadre du BRIFF 2021.

Cinergie : Parlez-nous de votre parcours.

Harpo Guit : Nous sommes venus faire nos études supérieures à Bruxelles, tous les deux avec une envie de faire du cinéma. Lenny a fait l’IAD en montage, et de mon côté je suis entré au conservatoire de Bruxelles en arts dramatiques. Au cours de ces formations, nous avons eu la chance de croiser beaucoup de gens très motivés, qui partageaient notre envie de faire des films. On touchait déjà un peu à la réalisation, on avait des courts-métrages à notre actif, et c’est de ces rencontres qu’est née l’idée de ce premier long-métrage. Nous avions envie de travailler avec tous ces amis pour cette expérience.

 

C. : Qu’est-ce qui vous pousse à faire des films ?

Lenny Guit : Harpo, je te laisse répondre ?

Harpo : Ce n’est vraiment pas une question facile. Je pense que ça vient de notre amour du cinéma lui-même. Et être fan de films, ça nous a donné envie de faire partie de cette histoire, de s’intégrer dans cet univers de création.

 

C. : Cela se ressent dans Fils de plouc, vous avez une palette d’influences énorme. Est-ce qu’il y en a certaines vers lesquelles vous revenez plus que d’autres ?

Lenny : Nous avons beaucoup d’amour pour Claude Lelouch et son cinéma.

Harpo : Et les comédies italiennes des années 60-70. Mario Monicelli, Dino Risi, Fellini, Ettore Scola, ce sont des gens qui nous inspirent dans notre façon de travailler, de construire l’humour. À côté de ça, nous consommons énormément de films, et je pense que cela nous nourrit au quotidien.

 

C. : D’où est venue l’idée de Fils de plouc ?

Lenny : On voulait raconter une histoire à Bruxelles pleine d’aventures et de personnages atypiques auxquels les spectateurs peuvent s’attacher. Nous avons essayé de faire le panorama de notre vision de Bruxelles, tout en intégrant nos amis et nos rencontres dans le scénario et dans le casting. L’idée, c’était vraiment de faire un film pour s’amuser.

 

C. : On vous a déjà dit que vous étiez très "belges" ?

Harpo : Souvent oui, et notamment depuis la diffusion du film à Sundance, où l’on nous a beaucoup fait la remarque à propos de Fils de plouc. C’est une fierté, nous sommes ravis d’être qualifiés comme tels. Et Bruxelles, nous en sommes tombés amoureux. Il y a tellement de personnages que nous avons rencontrés ici, tellement de choses qui s’y passent, tellement de quartiers que nous avons découverts. Depuis le temps que nous habitons ici, nous nous sentons Bruxellois, nous sommes Bruxellois. C’est notre ville, et notre culture maintenant.

 

C. : Comment avez-vous sélectionné votre galerie de personnages ?

Lenny : De la même façon que nous avions envie de créer un décalage au niveau des péripéties du film, nous voulions raconter l’histoire de personnages marginaux. Aller dans des endroits peu connus de Bruxelles, ou bien peu filmés, peu visités. D’une certaine manière, ces personnages étaient notre porte d’entrée pour montrer cette “autre Bruxelles”. À côté de ça, notre but était de pousser les curseurs au-delà de la vraie vie, avec des personnages un peu fous, qui ne pourraient pas exister en réalité. C’est comme ça qu’on a fait nos choix et qu’on a construit notre univers.

 

C. : Et votre casting a découlé de ces choix ?

Lenny : Oui et non. D’une part, nous avions déjà écrit le scénario et nous avions une partie des personnages en tête, et de l’autre, nous voulions tourner avec les personnes que nous avions rencontrées en école de cinéma et au conservatoire. Nous avons construit notre casting, puis ils ont pu travailler avec nous et adapter le scénario pour que les rôles leur correspondent et qu’ils soient plus à l’aise pour pouvoir déployer le personnage selon leur ressenti.

 

C. : Comment travaillez-vous ensemble ?

Harpo : Facile, on fait tout ensemble. De l’écriture à la relecture, nous nous mettons face à la feuille et le travail se fait systématiquement à deux.

Lenny : Et pour la réalisation, nous nous faisons entièrement confiance et discutons de tous les aspects du film. De manière générale, nous avons une confiance aveugle l’un dans l’autre et nous savons que quels que soient les choix, on ira toujours dans la même direction.

C. : Et le côté trash du film, c’est votre ADN ?

Lenny : Pas forcément. Ce qui importe pour nous, c’est de raconter des histoires qui nous amusent. Avec Fils de plouc, nous sommes allés jusqu’au bout parce que nous voulions explorer les chemins que d’autres cinéastes que nous aimons avaient tracés avant nous.

Harpo : Faire vivre des aventures folles à nos personnages, c’était vraiment la direction générale du film. Les choses qui nous faisaient rire se sont enchaînées, et c’est comme cela que nous sommes arrivés à ce résultat. Sinon, on est très "clean" dans la vie en fait.

 

C. : Le moment le plus fou de votre tournage ?

Harpo : Quand nous avons dû tourner la course-poursuite sur la Grand Place, il n’y avait que le caméraman, Maxi [Delmelle] et moi car nous n’avions pas toutes les autorisations. Dans la scène, il y a aussi un pistolet, mais nous tournions sans... trop risqué sinon. On a fait 4 ou 5 prises en courant et en criant à travers la Grand Place, avec la caméra qui nous poursuivait. Et au bout de la cinquième prise, nous sommes tombés nez à nez face à des agents de police qui ont menacé de nous arrêter. Il a fallu s’excuser, inventer une histoire de film d’école…

Lenny : Mais il manquait une prise, donc la dernière s’est faite en courant à travers la place, mais sans s’arrêter ensuite, avec rendez-vous direct au Mont des Arts. Est-ce que les policiers nous ont coursés, ça je ne sais pas, c’est probable…

 

C. Et d’où vient le nom de Jacques-Janvier, le chien héros du film ?

Harpo : Alors c’est tout bête, c’est une référence à un vrai chien bruxellois. Un grand chien blanc qui vit dans le lieu artistique Le Lac, juste à côté du canal. Comme nous adorions le nom, on a demandé au propriétaire si on pouvait l’utiliser dans le film, et c’est comme ça que notre chien s’appelle Jacques-Janvier. Dans la vraie vie, il s’appelle Fresco.

 

C. : Que retirez-vous de cette première expérience ?

Lenny : Beaucoup, beaucoup de bonheur. Nous avons eu beaucoup de chance, et on est vraiment trop heureux d’avoir pu réaliser un long-métrage. Nous espérons pouvoir en faire d’autres bien sûr, mais même si cela reste le seul film de notre carrière, ça nous va.

Harpo : Et nous continuerons à travailler ensemble, quoi qu’il arrive.

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