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Geneviève Kinet : Faire rayonner l’animation belge hors de ses frontières

Publié le 24/05/2024 par Kevin Giraud / Catégorie: Entrevue

L’animation belge? Définitivement tendance, selon Geneviève Kinet, chargée de projet pour l’agence Wallonie-Bruxelles Image. Au Cartoon Movie, et sur les marchés internationaux du MIFA à Annecy en passant par les allées du festival de Cannes, c’est ce qu’elle défend avec le sourire depuis longtemps. Rencontre lors d’un salon professionnel où la Belgique figure parmi les pays les plus représentés au travers de nombreux talents, témoins d’une richesse toute noir-jaune-rouge.

Cinergie : Pour commencer, pouvez-vous nous dire comment est perçue l’animation belge aujourd’hui à l’international?
Geneviève Kinet : Je pense que cela se passe très très bien pour le secteur à l’heure actuelle. Nous avons des producteurs, ainsi que des studios qui ont une bonne renommée, et qui reçoivent de nombreuses demandes et sollicitations, au point parfois d’être complets.

 

C. : Les films belges d’animation sont d’ailleurs souvent sélectionnés en festival, mais ce sont majoritairement des courts métrages?

G.K. : En effet, mais c’est aussi le problème de l’économie du long métrage d’animation. En Belgique, on produit des courts métrages à travers les films d’école, les films de fin d’études, mais il y a également des sociétés comme La Boîte,... Productions qui se sont spécialisées dans les courts métrages d’animation. Cela permet une production plus active dans ce format, même si nous avons de plus en plus de coproductions dans le domaine du long métrage d’animation, sur des films de qualité.

 

C. : Quels sont les freins à cette production de long métrage en Belgique?

G.K. : Le budget, tout simplement. C’est le fait de pouvoir trouver ce budget majoritaire en Belgique francophone, malgré tous les guichets et toutes les aides possibles. Aujourd’hui, c’est très difficile de pouvoir faire un long métrage d’animation sans coproduction. Cela arrive, mais c’est difficile.

 

C. : Nous sommes ici au Cartoon Movie, où il y a plusieurs projets de longs métrages belges ou coproduits en Belgique qui sont présentés, quels sont selon vous les rendez-vous immanquables pour un.e producteur.ice belge d’animation?

G.K. : Être présent ici, c’est un bon début. Il faut absolument participer au MIFA à Annecy, et pour les longs métrages une visibilité sur le Festival de Cannes est toujours bonne à prendre.

 

C. : Comment Wallonie-Bruxelles Image s’intègre dans cette stratégie, et quels sont les outils que l’agence met à disposition des professionnel.les de l’animation en Belgique?

G.K. : Nous sommes très actifs sur les marchés à l’international. Notre but, c’est d’y avoir une présence, d’organiser un stand et de créer des moments de rencontre, de réseautage pour permettre aux producteur.ices de rencontrer de potentiels partenaires. Notre objectif, c’est de faciliter la tâche aux personnes qui souhaitent coproduire.

 

C. : Est-ce un effort national coordonné, ou bien une démarche divisée en Nord et Sud?

G.K. : En Belgique, comme vous le savez, la culture est divisée entre les deux communautés. Ce n’est pas donc pas directement coordonné, mais nous avons de très bonnes relations avec nos homologues. Pour avoir une meilleure visibilité, c’est plus intéressant de s’unir, et c’est ce que nous faisons dans des événements de networking comme à Annecy, où nous organisons d’ailleurs un cocktail Bénélux. Dans les faits, nous avons plusieurs événements qui portent le label “belge” comme notre stand commun au Marché du Film de Cannes, plutôt que de jouer chacun.e de notre côté.

 

C. : Pouvez-vous nous citer quelques projets qui ont récemment bénéficié de votre soutien?

G.K. : En pratique, il faut que ce soit des films qui aient été sélectionnés dans des festivals où nous avons une présence. Récemment, il y a bien sûr eu Sirocco et le Royaume des courants d’air de Benoît Chieux [co-production Take Five, lire par ailleurs notre interview du producteur Grégory Zalcman, NDLR], mais aussi Yuku et la Fleur de l’Himalaya de Rémi Durin et Arnaud Demuynck qui ont pu bénéficier de ce soutien. La sélection en festival, ou dans ce genre d’événements, est essentielle pour que nous puissions organiser ensuite les opportunités de réseautage, de partenariats, ou encore de publicité. Tout cela dépend donc du film, de son avancement, et des rendez-vous potentiels que nous pouvons organiser avec des acheteurs potentiels ou des distributeurs.

 

C. : Wallonie-Bruxelles Image fait-elle un travail de lobbying pour mettre en avant ces talents et ces films?

G.K. : Là où nous pouvons avoir un impact, c’est en contactant directement les festivals et en leur présentant des propositions en fonction de leurs lignes éditoriales. En mettant en avant des films qui, selon nous, pourraient potentiellement les intéresser et qui sont disponibles ou très bientôt disponibles. S’il y a une marque d’intérêt, alors on leur propose de venir visionner le film en Belgique, ou de leur envoyer une version de travail avec un suivi, des relances, afin de continuer à soutenir la proposition.

 

C. : Il y a donc aussi une volonté de faire venir les professionnels internationaux en Belgique.

G.K. : Oui tout à fait, et cela est valable autant pour l’animation que pour la fiction. Je pense que le fait de les faire venir en Belgique et de leur permettre de rencontrer nos producteurs permet d’avoir une meilleure visibilité et plus de sélections des films à l’étranger. Et cela, on l’organise, en tout cas avec celles et ceux qui veulent bien se déplacer dans cette ère post-COVID. Mais aujourd’hui, on assiste à un retour à la normale, et les gens reviennent.

 

C. : On entend parfois dans les salons et les couloirs que la Belgique est un “pays de prestataires”, en termes d’animation..

G.K. : Cela me semble un peu péjoratif. Mais je vais retourner cette affirmation dans l’autre sens. Je pense que c’est notre savoir-faire et nos compétences qui sont recherchées. Nous avons de très bons techniciens, de bons studios, et un rapport qualité-prix qui défie ce que font nos voisins. Et c’est un avantage selon moi, c’est pour cela que la Belgique est dans de telles coproductions.

 

C. : Au vu des tendances actuelles, quelle est la stratégie de Wallonie-Bruxelles Image vis-à-vis du cinéma d’animation?

G.K. : Nous allons poursuivre nos actions, et notamment en novembre à Bruxelles pour le prochain Cartoon Business, où nous participerons de manière active. Ce sera l’occasion idéale pour organiser une mise en avant de notre animation auprès de très nombreux professionnels du métier qui seront disponibles et demandeurs, nous allons en profiter pleinement. Du reste, j’insiste sur le fait qu’être présent à des événements comme le MIFA à Annecy est capital pour les producteurs belges. Certes, cela représente un coût, mais je pense que les retombées de ce type de participation sont énormes, autant à titre individuel que pour la carrière d’un studio.

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