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Domus de Janas, histoires de l'arrière-pays sarde de Myriam Raccah

Publié le 20/11/2023 par Grégory Cavinato / Catégorie: Critique

Légendes vivantes 

À Oliena, petit village au pied du mont Corrasi, dans l’arrière-pays sarde, les traditions et les vieilles histoires se perdent, notamment à cause de la crise du coronavirus. Auparavant, chaque année, le soir du 23 juin, on fêtait les feux de la Saint-Jean : on prenait des feuillages bénis lors de la procession de Corpus Domine et on les brûlait le soir au crépuscule. On allumait le feu, puis on sautait par-dessus en faisant un signe de croix avant de réciter une prière. Mais depuis 2019, plus rien… Alors que la sécheresse bat son plein sur la Sardaigne et que les incendies menacent de gâcher l’été, la réalisatrice visite le territoire pour faire émerger de vieilles légendes convoquant des personnages et des lieux suspendus entre deux mondes : animaux parlants, trésors cachés, grottes peuplées de créatures maléfiques... 

Domus de Janas, histoires de l'arrière-pays sarde de Myriam Raccah

Dans la famille de la cinéaste, plus personne ne se rappelle de ces légendes, comme si elles s’étaient volatilisées, perdues avec le passage du temps. Elle est donc allée de village en village, dans des décors sublimes, à la recherche des doyens pour les lui raconter, et c’est à Oliena qu’elle a trouvé son bonheur. 

Parmi les contes ancestraux qu’on lui raconte : « Il Fiore Magico di San Giovanni » (La Fleur Magique de la Saint-Jean), l’histoire d’une fleur cachée au fond d’un gouffre au sommet du mont Corrasi, protégée par le Diable en personne, mais qui exaucera tous les vœux du courageux qui la cueillera… Dans « La Mandria Incantata » (Le Troupeau enchanté), toutes les fourmis d’une fourmilière se transforment soudainement en vaches… Et dans « Il Tesoro delle Janas » (Le Trésor des Janas), un berger suit un son étrange qui l’attire irrésistiblement et trouve une aiguille en or appartenant à une fée... 

Pour transmettre ces drôles de fables et autres contes initiatiques pratiquement oubliés dans la culture populaire du 21ème siècle, Myriam Raccah s’entoure de nouveaux collaborateurs : son amie Pina Monne, peintre, se met au travail pour les illustrer, quatre jeunes du village s’entrainent aux chants traditionnels et Myriam les filme en train d’incarner les héros des récits. La réalisatrice signe ainsi un attachant petit film « pour ne plus oublier », en forme d’hommage à la tradition orale des vieilles histoires qui rendent nos vies plus riches et plus magiques. Elle nous propose au passage une fascinante collection de paysages qui nous feront tomber amoureux - si ce n’est déjà le cas – de ce paradis qu’est la Sardaigne.

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