Dans la collection « côté films », Clélia Zernik aborde Les Sept Samouraïs (1954), l'un des films mythiques d’Akira Kurosawa, né d'un père samouraï descendant d'une longue lignée du nord du Japon. Son frère cinéphile l'a dirigé vers un autre monde, celui du cinéma.
Les Sept Samouraïs
Le film de Kurosawa installe les spectateurs dans un village du XVIe siècle. Les habitants, harcelés par des bandits qui les rançonnent, demandent à des samouraïs de les défendre. Kambeï et Katsushiro recrutent des soldats errants et, lors d'un assaut final, délivrent les villageois. Sitôt la paix revenue, les chevaliers errants quittent l'endroit. Les fermiers demeurent et reprennent leurs travaux agricoles.
Plutôt que la lutte pour le pouvoir, Clélia Zernik analyse le film de Kurosawa à partir de la mise en scène des corps. Les brigands ont un corps en mouvement, tandis que les paysans ont des postures abattues. Mais le corps possède une réserve d'énergie et peut s'éduquer, devenir un instrument de maîtrise comme l'apprennent les samouraïs aux villageois. La chorégraphie des corps dans l'espace participe à la mise en scène. L'épisode nocturne lorsque les samouraïs attaquent le repaire des brigands en est une excellente illustration : les brigands bondissent hors des flammes et leurs corps disparaissent dans un ruisseau de feu qui envahit l'écran, de l'obscurité à la lumière (du noir au blanc). Les sept Samouraïs pour Henri Agel est le chef-d'œuvre de Kurosawa qui possède, selon lui, « la vigueur rythmique et la splendeur visuelle » d’Alexandre Nevski d’Eisenstein.
Le film en noir et blanc dure 207 minutes dans sa version originale, 160 pour les salles japonaises et 130 pour l'exportation dans le monde entier. C'est cette version que nous connaissons en Europe et que Tony Richardson a comparée à un film de John Ford (in Sight and Sound, printemps 1955).
En 1960, John Sturges a réalisé Les Sept mercenaires, un remake étasunien sous forme de western. Il y a d'autres pistes dans les analyses de Clélia Zernik sur l'épopée du film de Kurosawa. Retenons cette citation sur le rôle de législateur des samouraïs : « La tâche la plus haute des samouraïs est de changer la nature humaine, d'inculquer la rectitude et la justice. Les mœurs, terreau nécessaire à l'institution du corps social, doivent être instillés dans le cœur du peuple, par la sagesse des samouraïs ».
Les Sept samouraïs d'Akira Kurosawa par Clélia Zernik, éditions Yellow Now, côté films, 22.