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Matin Calme de Annick Ghijzelings

Publié le 01/11/2004 par Marceau Verhaeghe / Catégorie: Critique
Matin Calme de Annick Ghijzelings

Matin calme

Avec son précédent court métrage, Le Jardin, Annick Ghijzelings nous parlait, entre autres, du temps qui passe et laisse des traces, sujet qu'on retrouve en filigrane de son second film: Matin calme. Lui et elle se sont aimés, se sont mariés et ont vécu heureux dans cet appartement plein de leurs souvenirs, mais le temps a passé sur cet amour et, aujourd'hui, ils se séparent. C'est l'heure de la mise en caisses et des déménageurs. Deux camions, deux piles d'affaires emportées sans état d'âme par des inconnus qui pénètrent dans cet espace intime où ce couple a tout partagé. C'est ressenti comme un viol, un saccage et derrière, il y a ce sentiment d'échec, de gâchis. Voilà le moment où le passé s'arrache comme un sparadrap qui colle aux poils. Et puis l'autre, qui ne dit rien. Avec qui l'on n'échange que des banalités utilitaires (cette caisse est à toi ou à moi? Elle va dans l'entrée ou le salon?). Ces deux-là se sont déjà tellement disputés, il ne reste plus rien à dire. Tant de choses pourtant passent encore dans le silence, les gestes, les attitudes.
Pour décrire cette épreuve que d'innombrables couples ont traversée, Annick Ghijzelings choisit la sobriété. La narration est linéaire. Peu ou pas d'incursions dans le passé. Son histoire, ce couple la garde pour lui. Les dialogues sont réduits au minimum, seule compte la présence de la femme et de l'homme : Jan Decleir, puissance et rage contenue, Catherine Montondo, tristesse lumineuse. La caméra s'attache à ces êtres dans toute leur fragilité, colle au plus près des sentiments : la tristesse, la colère, et ces bouffées de regret, pulsions vite étouffées, remugles d'un passé qui peine à mourir. Puis soudain elle les relâche, recule, réintègre l'appartement dans son champ de vision. Les émotions complexes passent avec un air de déjà vécu.

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