Après Rester Vivant, Shams et Shift, ponctués d’un travail photographique et de multiples engagements en tant que journaliste, Pauline Beugnies revient, 25 ans après la marche blanche, sur l’affaire Dutroux à partir d’archives familiales et télévisées. Petites est le récit de la découverte des multiples victimes du pédophile, raconté par cette génération d’enfants, aujourd’hui adultes, mais qui a vécu de front cette sordide affaire et les conséquences sur son intimité.
Petites de Pauline Beugnies - RENCONTRES IMAGES MENTALES
Que signifie être un enfant dans les années 90 en Belgique ? Il y a 25 ans, plus de 350 000 personnes défilaient en silence dans les rues de Bruxelles pour témoigner de leur dégoût et de leur colère face à l’affaire Dutroux. Aujourd’hui, que reste-t-il ? Des images, des souvenirs, des mots, et toujours autant de questions et d’écœurement. C’est sans doute à ces questions que le film de la réalisatrice Pauline Beugnies tente de répondre. Construit à partir d’images d’archives de presse, de journaux télévisés, d’émissions, de photographies et de films de famille, Petites retrace de manière libre l’affaire Dutroux en donnant la parole aux enfants d’hier, celles et ceux de 1996, qui ont regardé ces images, ces portraits de Julie, Mélissa, Ann et Eefje, les images des fouilles, des policiers, de l’arrestation, du peuple en colère.
Le choix pour une forme intermédiaire, entre cinéma et archives, questionne alors la fragilité des souvenirs, la confrontation entre le souvenir des événements et les images, les dépliant avec les voix du présent. Ce réinvestissement des archives, outre dévoiler des blessures et raviver des fantômes, prend position pour une autre lecture de l’affaire sous un prisme complètement occulté à l’époque : celui des enfants. Car pour certaines personnes, cette affaire a engendré des traumatismes, une impossibilité à vivre pleinement leur jeunesse, mais aussi la découverte des violences sexuelles.
Le film de Pauline Beugnies interroge notre capacité d’action face à ses images et ravive un traumatisme collectif. Cette utilisation critique des images médiatiques télévisées, souvent présentées sans trop de contextes et d’explications et consommées par les adultes, ont influencé leur vision du monde. Leur mise en circulation dans un film permet alors de narrer un récit touchant et pose un nouveau regard sur l’affaire.