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The Replacement de Oscar Aibar

Publié le 13/09/2022 par Kevin Giraud / Catégorie: Critique

Si, d'ordinaire, les bonnes histoires de nazis que l'on découvre au BIFFF impliquent plutôt moultes effusions de sang, quelques zombies et pourquoi pas la lune, le récit de The Replacement est bien plus terre à terre. Pour autant, n'attendez pas une fable fleur bleue et pleine de bons sentiments. Derrière cette histoire inspirée de faits réels se cache la dure réalité de l'Espagne post-franquiste, et de sa complaisance envers certains individus que vous ne recommanderiez pas même à votre pire ennemi.

The Replacement de Oscar Aibar

Récit encadré par le témoignage de l'une des protagonistes, la médecin Eva Vidal (Vicky Luengo), ce film policier sauce eighties débute par le meurtre d'un policier, et son remplacement par le madrilène Andrés Exposito (Ricardo Gomez). Un crime dans une station balnéaire plutôt calme, mais qui en cache visiblement beaucoup d’autres. Et le fait que le chef de la police locale ait classé l’affaire sans suites ne rassure pas non plus le flic sentant le coup fourré. Pourquoi ce silence, et pourquoi lui et son collègue sont-ils assignés à la surveillance de la communauté allemande locale, alors qu’elle semble on ne peut plus paisible ? Derrière les apparences, il y a peut-être bien plus qu’un simple village de vacances pour retraités germaniques. Commence alors une enquête où se mêle corruption, petite et grande Histoire.

C’est au travers du collègue d’Andrés, Colombo (Pere Ponce), que l’on comprend petit à petit que ces Allemands ne sont pas surveillés, mais protégés. Car à coups de pots-de-vin, ils se sont assurés la mainmise sur les autorités locales de la ville de Dénia afin de pouvoir exercer leurs sombres passe-temps sans encombre. De dîners de gala en uniformes nazis à une politique agressive de conquête immobilière, ils ne reculent devant rien pour augmenter leur profit, au grand dam de la population locale. Dans sa construction narrative, ce polar d’Oscar Aibar (El Gran Vasquez, El Bosc) ne révolutionne pas les codes du genre, mais utilise avec efficacité des mécaniques bien huilées de suspense, tout en y ajoutant sa petite touche d’humour et de cynisme. Colombo, qui semblait n’être qu’un policier peu doué mis sur une voie de garage jusqu’à la retraite, se révèle fin enquêteur et seul être humain encore droit dans ses bottes, dans cette institution corrompue par les Nazis. Andrés, le dur-à-cuire, est en fait un orphelin sensible, qui tente d’offrir à sa fille ce que lui n’a pas pu recevoir de ses parents. Et la calme et tranquille Eva Vidal est une activiste féministe d’avant l’heure, première médecin de son service dans un contexte encore très machiste.

Combinés, ces trois caractères forts portent le film, nous entraînant avec conviction dans leur recherche de la vérité, avant qu’ils ne la fassent éclater au grand jour. Et le film de se conclure - après quelques scènes de course-poursuite et d’action - sur un beau message d’espoir, malgré l’adversité. Une œuvre intéressante à plus d’un titre, qui vous fera frémir.

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