La guerre en cours…
Une idylle qui tourne mal, un meurtre en pleine rue sans témoin ou des travailleurs révoltés, le cinéma de Lucas Belvaux, aussi sociologique que philosophique scrute, film après film, les lignes de failles qui traversent notre époque. Chez nous, jeté sur les écrans français à quelques mois des élections présidentielles, prend à bras le corps la question de plus en plus douloureuse des partis populistes d’extrême droite. Hétérogène, ample et irrégulier, le film déconcerte d’abord avant de se creuser de complexité pour revenir faire sens, comme un boomerang. Et avec la même force. Sélectionné au Festival de Rotterdam, il a déjà fait parler de lui, non pas pour ses qualités cinématographiques, mais parce qu’il a créé la polémique avant même sa sortie. Dès la diffusion de la bande annonce, le Front national, qui s’est reconnu dans ce portrait, a lâché ses chiens de garde dans les médias et sur les réseaux sociaux. Mais s’il faut du courage pour faire face aux chiens, Belvaux n’en a pas manqué pour se pencher avec attention sur ce qu’il dénonce et pour lancer sa propre contre-offensive. Parce qu’avec cette vaste fresque des rouages d’un parti politique, il déconstruit lentement deux images. Celle d’abord, lisse, propre, révolutionnaire que se donnent les partis populistes. Et l’autre, construite par les médias, de leurs électeurs, stupides, bornés, racistes à travers le portrait de cette femme comme tout de monde. Avec Chez nous, il entre de plain pied dans cette guerre, celle des images, avec les armes du cinéma.