Défaire la domination
Arrivée du Cameroun en Belgique pour faire ses études de cinéma à l’INSAS, Rosine Mbakam a déjà réalisé plusieurs documentaires qui, à chaque fois, interrogent des femmes dans leur environnement et leur rendent, grâce à la parole en jeu tout au long du processus de création, leur puissance. Un procédé poussé encore plus loin avec Les prières de Delphine, son dernier film. De son amie dont elle recueille l’histoire, les colères, les douleurs, elle fait un portrait bouleversant, celui d’une femme qui retrouve sa dignité en racontant toutes les violences qui lui ont été faites. Calme et posée, avec une certaine douceur et beaucoup de détermination, Rosine Mbakam met en jeu dans chacun de ses films son travail de réalisatrice qui consiste, lui aussi, à s’affranchir des rôles assignées par une société traversée de profonds schémas de domination. S’il y a de la frontalité dans son cinéma, c’est que s’affranchir de ces rôles revient à prendre sa place, à exister entièrement, dans toute la complexité d’une réalité historique sous-jacente, et bel et bien violente.