Dix ans après son premier long-métrage, Get Born, la réalisatrice belge Nicole Palo revient enfin, avec une comédie fantaisie qui tourne en dérision le suicide, la crise de la trentaine et ses déboires avec le milieu cinématographique.
Emma Peeters de Nicole Palo
Tous les professionnels vous le diront, se faire sa place dans le cinéma est un vrai sacerdoce. Nicole Palo en fait indéniablement partie : un bref coup d’œil à sa filmographie nous apprend que dix longues années séparent son premier long-métrage de son second. Il y a donc un certain sens à ce que la protagoniste de son nouveau film, Emma Peeters, vive elle aussi les souffrances et les malheurs du Septième art.
Mme Peeters (Emma pour les intimes) est une comédienne d’une trentaine d’années qui parcourt les castings où elle essuie refus sur refus. Au désespoir sur tous les plans, elle troque finalement son désir d’être devant une caméra pour une autre ambition : celle de mettre fin à ses jours dans les règles de l’art. Un projet qu’elle met en place avec la même désinvolture qu’elle aurait à organiser des vacances à la mer. La date de son suicide fixée, elle va jusqu’à créer une liste de tâches à accomplir avant de passer l’arme à gauche, qui comprend notamment de coucher une dernière fois et de trouver quelqu’un pour s’occuper de son chat. C’est avec une sérénité étrange mais fascinante que la jeune femme contemple donc sa future mort, elle dont la bibliothèque déborde des écrits peu optimistes de Charles Bukowski et Michel Houellebecq.
Pourtant, le ton du film est loin des deux auteurs cités. C’est en effet plutôt du côté de la comédie romantique que du drame misanthrope que se situe Emma Peeters. À vrai dire, l’ombre d’Amélie Poulain ne plane pas très loin de cette œuvre fantaisiste qui reconstitue talentueusement Paris... avec des morceaux de Belgique et du Québec ! C’est d’ailleurs à une actrice québécoise que Nicolas Palo a fait appel : Monia Chokri, qu’on a pu admirer chez Xavier Dolan (Les amours imaginaires) ou chez Katell Quillévéré (Réparez les vivants). Le cœur du film bat au rythme de son interprétation qui exulte la candeur et l’ironie.
Portée par un goût marqué pour le pastiche, Nicole Palo s’inspire du cinéma de patrimoine pour laisser libre cours à son imagination, comme lorsqu’elle revisite la mort sous la forme d’un film muet. Elle montre un certain confort dans les codes de la comédie romantique, amenant son héroïne vers une rencontre fortuite (mais finalement heureuse) avec un directeur de pompes funèbres qui se met à son service de plus d’une manière. Les situations cocasses s’enchaînent avec les quiproquos, et on se laisse facilement gagner par cette comédie au concept morbide mais au ton plaisamment léger.