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Entrevue avec Pierre Lekeux et la production de films low-budget

Publié le 01/11/2001 par Jean-Michel Vlaeminckx / Catégorie: Entrevue

Low Budget, un risque calculé

Entrevue avec Pierre Lekeux et la production de films low-budget

Cinergie : Si vous deviez faire un bilan, votre expérience de production de films low-budget se solde-t-elle par un résultat positif ?
Pierre Lekeux : Mes impressions à chaud sont les suivantes. Avec seulement trois petites années d'expériences et un apprentissage sur le tas, le bilan semble globalement positif et encourageant. Radowski Films a produit des films difficiles tant du point de vue budget que du point de vue contenu. J'ai investi, par conviction et nécessité, un créneau hors-normes et les résultats sont au rendez-vous.

La particularité des films low-budget que nous avons produits réside dans le fait qu'il a fallu créer une corrélation chaque fois nouvelle entre les moyens de Radowski Films et la volonté des réalisateurs de mener dans l'urgence leur projet. Ce que je constate, et c'était mon parti-pris dès le départ, c'est que les réalisateurs ont souvent besoin d'une structure souple pour libérer leurs talents ou démarrer dans le métier.


C. : Quel est votre définition d'un film low-budget ?
P. L. : C'est un film qui n'a pas bénéficié d'aide à la production. Ces sont des films qui bénéficient de très peu d'aides de façon générale et qui sont, la plupart du temps, réalisés avec les fonds propres de ou des maisons de production concernés.
Si vous prenez l'exemple de La Danse des esprits, ce film n'aurait pas pu voir le jour s'il n'avait pas été co-produit entièrement par Lazennec Productions et Epiky Films.


C. : La production low-budget est-elle une production à risques ? Ce genre de production permet-il à une maison de production de joindre les deux bouts ?
P. L. : Il est certain que le montage financier des films low-budget s'avère moins complexe. Leur coût reste relativement faible et la marge bénéficiaire peut donc être plus élevée, permettant ainsi au couple producteur-réalisateur de mieux rebondir. Par contre, c'est dans la non-distribution des films low-budget que les risques existent.


C. : Les low-budgets gagneraient-ils à être mieux distribuer ?
P. L. : Tout à fait, mais le meilleur moyen est de créer un nouveau réseau de distribution. Plus de salles, plus d'écrans et cela pour tout types de projets quelques soit la taille de la salle ou la taille de l'écran. C'est essentiellement en TV que la diffusion reste la plus intéressante, puique les low-budgets ne font pas, la plupart du temps, l'objet d'une co-production avec une chaîne ou d'une subsidiation. De plus, le coût de la distribution en salle reste très élévé, rien que les copies du film aspirent les aides à la promotion ou à la diffusion que nous pourrions obtenir pour un film low-budget.Et puis n'oublions pas que le distributeur doit lui aussi récupérer l'argent qu'il a investit en copies, si tel est le cas. Ceci dit, le travail sur les low-budget est fastidieux et demande toujours beaucoup d'investissement. La satisafation n'intervient réellement qu'à la sortie du film et lorsque le film a enfin trouver un chemin vers le public. C'est en ce sens là que je commence à en avoir marre des low-budgets.


C. : La production low-budget devrait-elle donc s'orienter vers les produits télévisuels ?
P. L. : Non, pas nécessairement, mais cela reste un excellent moyen pour se rémunérer. Malheureusement, la politique des télévisions attend souvent le succés en salle ou un premier passage sur une autre chaîne. En fait, il faut promouvoir des audaces et la télévision devrait elle aussi être promotrice d'audaces. A ce niveau, je rejoins le point de vue des membres de l'ARPF. Il est difficile de concevoir que dans son propre pays on ne puisse diffuser un film.


C. : La production low-budget a t-elle un avenir ?
P. L. : Tous les films ne peuvent pas se faire en low-budget, beaucoup nécessitent un réel financement. Un montage financier long et difficile et un succés pas forcément assuré, voilà le risque des films à financement classique. En Belgique, les maisons de production sont toujours au bord du naufrage. Il faut à l'heure actuelle trouver des mécanismes qui permettraient un refinancement conséquent du budget apparti à l''audio-visuel en Belgique. Le low-budget est une réponse très limité dans le temps à ce type de problème, mais cela ne peut durer même si un grand nombre de réalisateurs made in Communauté française de Belgique ont bénéficier, suite à ce genre d'expériences, d'un à priori favorable à l'étranger. A long terme, il faut créer un espace permettant la création de nouveaux prototypes. Si il est vrai que la période n'est pas très florissante, il faut laisser le soin aux réalisateurs d'amener des projets neufs, tenter et continuer à faire des essais afin qu'ils puissent être distribuer en Europe. C'est par la multiplication de ces tentatives que l'on pourra créer des réseaux de synérgies nouvelles. L'Académie Dogma est là pour nous rappeller qu'il est parfois possible de remodeler le paysage tout en arrivant à un résultat parfois étonnant. Le public finit par y trouver lui aussi son compte à un moment donné.D'un autre côté, on ne démarge pas des aides de la Communauté française de Belgique. Pour terminer, je pense que le low-budget reste une réponse fulgurante, intuitive. Il y a ce type de réponses partout dans le monde, mais cela ne règle pas les problèmes de fonds, ni la difficulté de faire du cinéma.

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