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Le court au CWB : Louis Héliot

Publié le 01/04/2006 par Katia Bayer / Catégorie: Entrevue

Le court au CWB
Deux mois après l’anniversaire de Wallimage, le Centre Wallonie-Bruxelles (CWB) célébrera le festival « Le court en dit long ».  Du 12 au 17 juin, le court métrage belge sera mis à l’honneur à Paris pour la  quatorzième année consécutive. Depuis plus de vingt ans, l’enseigne révèle en France les créateurs contemporains belges francophones à travers différentes disciplines et autant de départements culturels : arts plastiques, littérature et cinéma. La visibilité des œuvres et de leurs auteurs est une des volontés de ce relais belge situé à Paris, tout près de Beaubourg. Depuis 1993, le centre culturel organise « Le court en dit long », un festival dédié au format court.  Depuis 2003, celui-ci est devenu compétitif et propose une sélection de courts parmi la centaine de films produits et coproduits chaque année en Communauté française. Reflet de la production de l’année, de la diversité des genres et des formats, la manifestation est conduite par Louis Héliot, programmateur et responsable de la cellule cinéma.

Louis HéliotCinergie : Comment le court métrage a-t-il émergé au Centre Wallonie-Bruxelles?
Louis Héliot : Au sein du Centre, je m’occupe du cinéma et de l’audiovisuel depuis 1991. J’ai conçu le département pour être un vrai service à la disposition des auteurs, des réalisateurs, des producteurs belges francophones sur la France. Bien sûr, il a fallu commencer à tout mettre sur pied à savoir des fichiers et des programmations. Comme j’avais vu le catalogue « Le Court en dit long » [édité par la Communauté française], j’ai très vite pris contact avec Marie-Hélène Massin qui s’en occupe. Je lui ai dit : « c’est bien de recenser les courts métrages. Et si on en montrait une partie?». Voilà, c’était une sorte de pari. Je me disais : « pourquoi on ne lancerait pas un centre culturel qui pourrait proposer des films puisqu’on a une salle de projection parfaitement équipée? »


C : De quelle manière établissez-vous la programmation de chaque édition ?
L.H. : Je vois tout ce qu’on m’envoie et quand je ne reçois pas directement [les films], je réclame. Il faut que je voie tous les films d’école, les films d’ateliers complètement indépendants et bien sûr les films qui sont réalisés et produits au sein des structures indépendantes et qui ont pu bénéficier du soutien de la Commission de Sélection du Film.

Il s’en produit à peu près une bonne centaine chaque année en Wallonie et à Bruxelles et j’en présente à peu près quarante en compétition. Pourquoi on ne les montre pas tous ? En cinq jours, c’est un peu difficile. Maintenant, il y a aussi des films qui sont ratés et il faut le reconnaître. On n’est pas là pour être des béni oui-oui en disant que tout ce qui vient de Wallonie et de Bruxelles est forcément bon. 

C. : En montrant en France ce qui se fait en Belgique, faîtes-vous figurer la double réalité du court-métrage à savoir la diversité des genres et des formats ?
L.H. : La volonté que j’ai au sein du « Court en dit long », c’est de décloisonner les genres. Donc, dans un même programme, on peut trouver un film d’animation, un documentaire, une fiction traditionnelle et un film expérimental. Et on peut très bien alterner la vidéo et le 35 mm avec du 16 mm au milieu. Mais pour le travail de programmation, il ne suffit pas de dire : « bon, je les projette dans l’ordre où je les ai sélectionnés. » Je suis aussi là pour agencer les films dans un certain ordre, faire en sorte qu’ils ne s’annulent pas les uns les autres.

Mort à VignoleC. : Effectivement, en étudiant la meilleure place pour chaque film, on leur offre un supplément de visibilité, on leur reconnaît une identité et une spécificité. Le programmateur, en apportant sa touche personnelle à la manifestation, fait acte de création d’une certaine manière.
L.H. : Moi, je ne conçois pas une programmation de type catalogue avec comme prétexte de vouloir être respectueux et de ne pas donner l’impression de favoriser un film plutôt qu’un autre. J’essaye que ça aille plutôt crescendo et qu’il y ait aussi un sens.

Des exemples tout simples ? Mort à Vignole d’Olivier Smolders est un vrai chef d’œuvre avec une vraie force, une vraie construction mais on ne peut rien passer après parce que n’importe quel film [qui lui succéderait] serait écrasé. Donc, oui, je termine une programmation par ce court métrage d’Olivier Smolders.

Même chose avec Solo de Thierry Knauff. Qu’est-ce qu’on peut passer après Solo ? C’est une telle expérience émotionnelle, sensorielle pour le public qui en prend plein les mirettes pendant presque trente minutes. En même temps, je reconnais que c’est une façon de présenter les films, qu’on peut présenter exactement les mêmes quarante films autrement. Et c’est justement à ça que servent les programmateurs dans les festivals.

C : J’ai l’impression que pendant que vous déterminez un ordre de passage, il y a toujours le risque qu’un nouveau film arrive et perturbe la programmation en cours.
L.H. : Oui, [c’est fréquent] quand on arrive à la date butoir à laquelle il est important de dévoiler quel sera le programme. On se dit : « mince, celui-ci qui vient d’arriver à la dernière minute, il chamboule tout et il faut tout recommencer ». De plus, cette année, il y a une tendance  nouvelle à avoir des courts métrages -on parle bien des films belges francophones- de plus en plus longs qui dépassent le quart d’heure et même souvent les vingt minutes. Pour la programmation, c’est compliqué.

C : Concrètement, comment se déroulent les projections ?
L. H. : Chaque programme passe deux fois depuis qu’il y a la compétition pour donner un maximum d’occasions au public de voir les films. On essaye que la durée n’excède pas 1h40 soit des programmes quotidiens composés de quatre, cinq ou six courts métrages. De plus, nous respectons la charte pour la diffusion du court métrage qui consiste à arrêter le projecteur à la fin d’un film, remettre la lumière, changer le cadre et recommencer.

C : A chaque fois, une expérience cinématographique. Le spectateur, à l’issue de chaque projection, a besoin de revenir à ses émotions et de se préparer au prochain film.
L.H. : Oui, il faut une respiration et de toute façon, il faut laisser le temps au jury de prendre des notes ! C’est une obligation quand on veut respecter les œuvres et ici, je suis très attaché à ce qu’on puisse présenter les films dans les meilleures conditions possibles, visuelles et sonores.

C : « Le court en dit long », à l’image de la politique du CWB, soutient les créateurs en présentant une partie de la production des oeuvres et en en récompensant certaines. Quels nouveaux prix seront délivrés le 17 juin, date de clôture du festival ?
L.H. : Cette année, on a des partenaires supplémentaires. Ce sera la première fois que les Prix d’interprétation féminine et masculine seront dotés et ce, grâce au Parlement francophone bruxellois.

Toute la saison, on a accueilli le Forum des Images « Hors les murs » pendant les travaux  pour tout ce qui était programmation jeunesse et scolaire.

Donc, la séance « L’Après-midi des Enfants » du samedi après-midi est incluse dans le festival. C’est un très beau programme de courts métrages de Norman Mc Laren qui est accompagné d’un éveil musical. Nous bénéficions également du label Francofffonies pour le festival francophone en France. Bonne nouvelle : nous avons un partenariat avec Oui.FM, radio rock qui nous suivra pendant toute la semaine du festival. De plus, en attendant la remise de prix, il y aura, au Festival, une lecture de  quatre scénarios qui auront été primés par NISI MASA, association de scénaristes européens. Enfin, en partenariat avec le festival francophone de Namur, on lance un concours de jeunes critiques ouvert aux français âgés de 18 à 25 ans. Le lauréat ou la lauréate intégrera le jury Jeunes qui remet le prix de la première œuvre à Namur.

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