Puisque je suis née de Jawad Rhalib

À travers l’oeil de la caméra, le réalisateur capture le rapport homme-femme via le prisme de ce village confiné aux bords des montagnes de l’Atlas. Nous voyons comment Zahira, une petite fille relativement impuissante de son destin, se bat pour aller à l’école et devenir comme son enseignante, vectrice de savoir, d’ouverture d’esprit afin de libérer le plus possible les femmes des traditions les restreignant à la maison. Nous voyons aussi combien le choix du père de supporter sa fille est jugé et désapprouvé dans le village. Mais nous voyons aussi comment les femmes réagissent face à leur situation, leurs conversations entre elles. 

Ceci est rendu possible grâce à cette intimité entre la présence de la caméra et la population du village. On peut aisément imaginer le travail de confiance et de présence qu’il a fallu mener pour capturer de tels moments. Il nous rappelle grâce à cela que le combat pour l’émancipation de la femme n’est pas juste un combat occidental. 

Il semble aussi que le film traite également de ce momentum très particulier qu’est l’arrivée du progressisme dans les populations. Il en devient presque un objet sociologique, où nous voyons les hommes adultes en parler, les enfants à l’école, les femmes entre elles, puis la grand-mère parler à Zahira pour finalement peindre le spectre d’une population en pleine ouverture vers de nouveaux modes de vie où la femme a droit aux savoirs, et une destinée libérée de celle imposée par les hommes, car aller à l’école, c’est gagner son indépendance. Les filles ne dépendent plus ni de leur père ni de leur mari. 

D'ailleurs, on nous montre très bien comment et pourquoi cela a été rendu possible pour Zahira. C’est parce qu’elle veut se battre pour son rêve, son ambition, son avenir.  En assumant ses “obligations” de petite femme au foyer, elle travaille sur ses leçons, car elle sait aussi qu’elle a encore des devoirs envers sa famille. Ainsi le père remue tout ce qu’il peut pour assumer les frais, les trajets, et fait face à tous les avis défavorables pour réaliser le rêve de Zahira. Ce très beau combat est complété par des conseils très pragmatiques sur la vie, sur  ce que cela implique aussi comme conséquences pour la famille. 

Puisque je suis née est un documentaire authentique jusqu’au malheureux drame de l’éboulement qui a touché de plein fouet le village et toutes les terres environnantes de l’Atlas, sans pour autant arrêter Zahira dans ses ambitions et sur le destin qu’elle se forge.