Le succès auprès du public des festivals de Alice et moi de Micha Wald est amplement mérité. Le film est d'une drôlerie à laquelle il est difficile de résister. Mais Micha Wald a plus d'une corde à son arc. Outre des films plus intimistes il désire faire des films opéra de la dimension de Aguire, la colère de Dieu de Werner Herzog, de Andreï Roublev d'Andreï Takovski ou du Voyage au bout de l'enfer de Michael Cimino. Serait-ce ses origines ukrainiennes qui le poussent vers un cinéma plus épique ? Entretien.
Entrevue avec Micha Wald
Le premier film qui l'ait étonné voire marqué est Le Satyricon de Féderico Fellini. Il l'a vu en troisième secondaire lors du cours de latin. « Je m'en souviens très bien. Surtout l'atmosphère et le récit qui est complètement décousu. Et si on remonte un peu plus loin, c'est Greystock. Parce que j'étais fasciné par Andie Mac Dowell. » À dix-sept ans il s'inscrit aux cours de l'Académie de Molenbeek dont le cours de cinéma est donné par Thierry Zéno.
« J'ai découvert le Musée du cinéma avec mon frère qui a un an de moins que moi. Il faut dire qu'on habitait à sept minutes de métro du cinéma. On y allait quatre ou cinq fois par semaine et on se faisait les trois séances. » Ils y ont passé une année en voyant un millier de films tout en n'ayant aucune idée sur leur désir de cinéma. Certes, concède-t-il, il voulait faire le concours de l'INSAS mais son obsession de la toile blanche et des sièges oranges ont dépassé l'idée de l'INSAS.
« Le vendredi soir Thierry Zéno nous projetait des films en pellicule 16mm., il nous a montré Aguire, la colère de Dieu de Werner Herzog et je me suis dit : ça c'est ce que je veux faire. Et puis Il était une fois en Amérique de Sergio Leone, Andreï Roublev d'Andreï Tarkovski. Des films mégalos. De grands opéras, en somme. » Pourtant jusqu'à l'âge de 16 ans il voulait devenir avocat et puis il a eu l'occasion de jouer dans Bruxelles-transit de Samy Szingelbaum et dans Muet comme une carpe de Boris Lehman. « Là je me suis rendu compte que c'était drôle et amusant de faire du cinéma. Beaucoup de choses étaient permises. C'était un foutoir très agréable. » Et il décide de faire l'INSAS en section montage. « Je m'étais dit que j'allais faire le montage pour faire un métier et pouvoir gagner ma vie. Avec le recul je me dis que j'aurais du faire la réalisation parce qu'au moins on fait deux films et avec des erreurs ce qui n'est plus permis par la suite. D'autant que le travail du monteur c'est super-chiant. Après l'INSAS, j'ai travaillé comme monteur, pendant un an, sur un documentaire. C'était de 9 heures du matin à 19 heures du soir, non-stop dans le noir. J'ai fait cela huit mois et j'ai arrêté. Je préfère consacrer mon énergie à l'écriture. J'aime la réalisation à cause de sa diversité. Il y a du casting, du repérage, du montage, de la postproduction et puis on suit le film en festival.
En 1996, à sa sortie de l'INSAS, il réalise À la recherche de Boris Lehman, qui est son film de fin d'études. Il va de soi que Boris n'est pas dans le film, car si celui-ci ne se départit pas du désir de filmer ce qui l'entoure, il a cependant horreur d'être filmé lui-même. « Je cherche Boris Lehman et je ne le trouve pas. C'est une sorte de comédie. » Ensuite, Micha Wald fait L'ELICIT désirant en apprendre davantage sur le scénario, échapper au montage et faire L'Université à son tour. « J'avais une frustration par rapport à l'INSAS où il y a tout de même peu de cours théoriques et je trouvais que cela me manquait. Après la première année, il n'y a plus que la pratique. Surtout ELICIT l'oblige à écrire, en ateliers, divers types de scénarios. « J'ai écris un scénario que je réaliserai lorsque je serai riche et célèbre (rires) Cela s'appelle Kazari et c'est Il était une fois l'Amérique qui se passerait en Pologne. Cela se déroule sur trois époques. C'est une grande saga avec deux frères, qui brasse plein de choses. »Après l'ULB, il réalise La nuit tous les chats sont gris que personne ne verra plus parce qu'il en a récupéré les droits. « L'esprit était de faire un film urbain se passant la nuit avec toutes des rencontres, dans l'esprit de After Hours. J'ai appris des choses mais je ne suis pas content du film. » Deux ans après, en réaction il réalise Les Galets avec Todo to day. « Je voulais un truc simple avec peu d'acteurs mais le scénario, en fin de compte, s'est révélé archi-compliqué. Hitchcock a dit que les trucs les plus durs à filmer sont les animaux, les enfants et l'eau. On avait les trois. ! »
Alice et moi a été révélé au public lors du Festival de Bruxelles devant une salle hilare. Même phénomène à Cannes et à Locarno. Les prix suivent; Jameson, Rail d'or, Prix des jeunes...Le scénario qu'il écrit en ce moment est d'une autre veine, plus épique. Cela s'appelle Le Voleur de chevaux. L'action se passe au siècle dernier en Ukraine. Mes grands-parents viennent de là.. Il y a un parfum d'exotisme. » En deux mots c'est un jeune cosaque qui traque deux voleurs de chevaux. C'est une histoire de vengeance à trois personnages. Ça se passe dans des bois, des landes."
"C'est dans le même esprit que j'ai écrit Iscuit, une commande d'après une idée de Jean-Paul De Zaetijd et Cathy Mlakar. Ils avaient un projet et ils m'ont demandé d'en finaliser l'écriture. Il y a un côté saga historique que j'aime bien que ce ne soit pas moi qui réalise le film."