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Bouli Lanners et Serge Larivière, duo dans J'ai toujours rêvé d'être un gangster

Publié le 01/04/2008 par Anne Feuillère / Catégorie: Entrevue

Ping Pong Splatch 


Les deux comédiens belges sont à l’affiche dans J’ai toujours rêvé d’être un gangster de Samuel Benchetrit, sorti en salle depuis le 26 mars.
Quatre ans après Janis et John, le second long métrage du Français Samuel Benchetrit,  J’ai toujours rêvé d’être un gangster, est arrivé sur les écrans belges à la fin du mois de mars, couronné du prix du meilleur scénario du prestigieux Festival de Sundance. Filmé dans un noir et blanc glamour et nostalgique, J’ai toujours rêvé d’être un gangster se compose de quatre épisodes burlesques tissés dans la même journée languissante. Dans un café paumé au bord d’une autoroute déserte, toute une galerie de personnages vient jouer son petit cinéma intime sous forme de duo/duel : d’à mort-amour entre Edouard Baer et Anna Mouglalis, duo de bras cassés pour le couple Lanners-Larivière en kidnappeurs loosers au cœur tendre, duel vieillissant sans café ni cigarettes entre les rockeurs braqueurs Bashung/Arno…

Bouli Lanners et Serge Larivière, duo dans J'ai toujours rêvé d'être un gangster

Et pour une bande de tontons flingueurs déglingués et élégants, le face à face a lieu avec une époque désormais révolue, le bon vieux temps des braquages buissonniers. Derrière cette suite de mini-intrigues qu’il noue façon western sur le ton de la comédie burlesque, derrière la tendresse avec laquelle il capte les comédies que se jouent ces dingues et ces paumés, Samuel Benchetrit lui, s’en est allé braquer tout ce qu’il aime au cinéma, slapsticks, road movie, polars, comédies à l’italienne… Bien au-delà des hommages et des citations, son film en tire des airs de chien fou en liberté qui détonne dans le paysage un peu enneigé du cinéma français. Au Festival International du Film Francophone de Namur où J’ai toujours rêvé d’être un gangster était présenté en clôture, nous avions tendu la perche à Bouli Lanners et Serge Larivière, qui crèvent l’écran dans leur duo parfait de chef-faussement-dur/gentil-faussement-niais. Les deux larrons se marchent sur les pieds et cabotinent, se lancent et relancent la balle à qui mieux mieux. Ça fait ping, ça fait pong et nous, au milieu, finalement, on fait splatch à la remorque sous les rebonds des balles. Et eux, ça les fait bien marrer... 

Cinergie : Vous aviez déjà travaillé ensemble ?
Serge Larivière: Mais oui hein ! À Canal + …
Bouli Lanners: On a fait une pièce de théâtre ensemble.
S.L.: Un cabaret !
B.L.: Un cabaret !! Et puis t’as un peu joué dans mon film…
S.L.: C’est vrai, j’ai joué dans Ultranova.
B.L.: Et on a joué tous les deux dans les mêmes films, mais jamais dans des scènes ensemble. Mais longtemps on est allé pointer ensemble.
S.L.: Voilà, c’est ça, on se retrouvait au chômage, on se voyait deux fois par mois. Le 3 et le 26.
B.L.: On se donnait rendez-vous et maintenant on continue à se voir le 3 et le 26, mais ici.
S.L.: Parfois à Tokyo ou à Berlin, aussi, ça dépend des fois. 

C.: Comment vous êtes-vous retrouvés dans J’ai toujours rêvé d’être un gangster ?
S.L.: Et bien, alors, nous avons rencontré Samuel sur le film Petites misères, un film belge que nous avons tourné il y a bien six ans maintenant. Quatre ans plus tard, il nous a rappelés et il avait écrit les rôles pour nous.
B.L.: Alors qu’il ne nous avait rien dit ! C’est vrai, je te jure ! Nous étions super étonnés qu’il ait pensé à nous et nous étions très touchés. Et puis voilà, on s’est retrouvé sur le film et on s’est dit qu’on allait bien le faire. On a travaillé comme des écoliers.
S.L.: On s’est beaucoup appliqué.
B.L.: C’est que Serge fait aussi du théâtre, il ne faut pas l’oublier ! Il a l’habitude de retenir des pages entières par cœur (Serge hoche la tête humblement) et Sam voulait que le texte soit connu au rasoir. On a répété chacun chez soi et sur le tournage, tous les soirs. Nous avons été très sages. Nous étions dans le même hôtel, il y avait deux petits restos en face, on y allait tous les soirs travailler avec notre petit demi de rouge. (Devant notre air dubitatif :) Mais je te jure ! Sur la tête de ma mère. Dring dring… Allô. Quoi maman !? ... Non, c’est  vrai, on a beaucoup travaillé. Il n’y a qu’une scène improvisée, celle du canari. Samuel savait très précisément ce qu’il voulait.
S.L.: Il a une écriture extrêmement précise. Tu ne peux pas changer un mot.
B.L.: Mais c’était tellement agréable aussi comme tournage. Samuel était très cool, on se sentait bien, et le fait d’avoir aussi bien intégré notre texte (parce qu’on savait que pour lui c’était important), nous permettait d’être à l’aise. Et puis c’était gai de jouer ensemble, hein, Serge ?
S.L.: Oui. Pendant des années, on a été en concurrence tous les deux sur les mêmes castings, pour les mêmes personnages.  Si ce n’est pas lui qui a le rôle, c’est moi. Ou l’inverse.
B.L.: Oui, et pourtant je suis bien plus musclé, plus grand. Il n’y a rien de personnel, excuse-moi, Serge, mais c’est vrai.
S.L.: Je le reconnais,  c’est vrai. 

C.: Vous avez beaucoup répété les scènes avec lui ?
S.L.: Non pas tellement. 
B.L.: Une ou deux fois sur le plateau. Par contre, il y a des scènes qu’on a tournées un nombre de fois… Le plan séquence où on la kidnappe, là, on l’a fait combien de fois ? 
S.L.: Oh la la, celui-là ! Quand on la prend dans la voiture ?
B.L.: Non, quand on monte à l’échelle, le premier plan…
S.L.: Ah oui, le tout premier ! C’était dur ! Il y avait toujours un truc avec cette fenêtre qui n’allait pas.
B.L.: On a fait 20 prises, et on parle d’un plan séquence, là ! Donc, on fait 20 fois quatre minutes. Et puis c’est une histoire de rythme, un plan-séquence, si tu plantes un petit truc, pour retrouver le bon rythme…
S.L.: Et le trouver déjà ! Et puis on était en plein soleil.
B.L.: On avait nos masques, il faisait chaud. Oui, celle-là, c’était dur. Je l’avais oubliée, tiens ! 

C.: C’est étonnant que vous ayez les mêmes emplois et ce d’autant plus que lorsqu’on vous voit tous les deux à l’écran, le duo fonctionne parfaitement. On s’étonne même de ne pas vous avoir vu ensemble plus tôt.
S.L.: C’est étonnant, hein ! Moi aussi, je me pose la question. Tiens ! Et ça il faut le dire !
B. L.: Mais oui ! Il faut le dire ! 
S.L.: Je dirais même plus, le claironner !
B.L.: (se penchant sur le micro :) Si jamais un réalisateur ou une réalisateur…
S.L.: ...trice
B.L.: une réalisatrice peut écrire un truc pour…
S.L.: nous deux…
B.L.: pour Serge et pour moi, ben…
S.L.: Allez-y !
B.L.: Si c’est bien écrit !
S.L.: Et bien payé !
B.L.: Et bien filmé ! mais heu… Mais pas un truc dans Septième Ciel !
S.L.: Ah non ! Pas ça ! 

C.: Vous êtes très présent à Namur tous les deux. Outre le film de Samuel Benchetrit, Bouli avec Où est la main de l’homme sans tête, Serge avec Formidable.
S.L.: Et même dans Cowboy, tiens, je fais une voix ! Et je fais une petite apparition dans le prochain film des Dardenne, Le Silence de Lorna. Et puis il y a le Houellebecq, La Possibilité d’une île. 

C.: Bouli, tu viens de terminer ton second film, Eldorado ?
B.L.: Oui, et celui de Delépine et Kerven, Louise Michel, où j’ai le premier rôle avec Yolande Moreau. J’ai l’impression que cela va donner un truc vraiment pas mal. Mais c’était un tournage difficile. Etonnamment, et pour tout le monde, c’était dur. Je crois que c’est parce que le volet psychologie des personnages était totalement absent de tout dialogue avec les réalisateurs. Donc, tu tâtonnes, et on a beaucoup cherché avec Yolande. C’est une façon de travailler qui n’est pas classique du tout. Mais on ne fait pas du cinéma parce que c’est facile, attention !
S.L.: Ah ben non ! Au contraire ! Plus c’est difficile, mieux c’est !

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