Les poings dans les poches
La flamme de la révolte est entretenue dans La Trajectoire oblique, film intéressant et agaçant de Dominique Lolhé. L'écran est divisé en deux comme au bon vieux temps de l'avant-garde warholienne.
D'un côté le monde et son spectacle télévisé en permanence : actualités, compétitions sportives, etc. De l'autre deux jeunes gens qui croient faire entendre leur voix dans le concert du monde en jouant les Bonnie and Clyde. Une jeune fille (la stupéfiante Raphaëlle Bruneau de Violette et Framboise) infantilisée par des parents aussi respectables qu'irresponsables rejoint le parcours d'un rejeton de la high society en rupture…
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Hard Target, cible émouvante
Iris d'or de cette 18ème compétition du court-métrage et le prix décerné par les critiques de l'Association professionnelle de la presse cinématographique de Belgique récompensent avec justesse Dear Jean-Claude, un film personnel, au scénario dense, au montage dynamique et aux images traitées de manière éminemment contemporaine (steadycam, recherche des perspectives, rythme syncopé, inserts de bouts de vidéos, d'images TV).
Outre ces qualités purement cinématographiques, Dear Jean-Claude fascine, non tant par le choix de son sujet, que par la manière dont il est abordé. Une vision originale et profondément humaine.…
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La chair de l'orchidée
Doucement de Jacques Decrop nous plonge dans l'intimité d'un couple : "Tu me fais confiance ?", dit-il. "C'est quoi ton truc, le sado-maso ? Vas-y, crache !" demande-t-elle.
- C'est une question d'amour.
- C'est quoi ? Ça fait mal ?
- Oui et non.
Et elle cède à une pratique que se garde de nous révéler le réalisateur (Fist fucking ? Sodomie ?) et que l'amour adoucit (de même que le beurre pour rester cinéphile).
Meurtrie, la fille se demande si son amant l'a possédée par sadisme ou par amour. Ce corps à corps qui devient un corps à coeur semble illustrer ces propos de La Fontaine :…
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Journal d'un curé des villes
La vie d'un curé de grande ville en cette fin de siècle n'est pas de tout repos. Tout comme le commun des mortels, le curé n'arrête pas de courir.
Il est épuisé de tant de visites et de réunions, de rencontres éclairs avec les gens. Même sa messe, il la célèbre en courant. Il culpabilise de ne plus avoir le temps de répondre aux inquiétudes de ses paroissiens, il est lui-même désemparé. Le seul endroit où il arrive à se retrouver, à recouvrer sa foi est cette petite chapelle dédiée à Saint Alba, perdue dans les montagnes, près du village où il a été curé…
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Les mystères de l'ouest (Vlanderen)
Deux jeunes gens jaloux d'un rival plus talentueux qu'eux n'hésitent pas à le jeter plus mort que vif dans le canal. Mais dans ces eaux s'est dilué un mystérieux élixir qui a la propriété de ramener les cadavres à la vie.
Enième version de la nuit de la revanche du retour du fils de la fiancée des morts vivants ? Ben oui, mais une version "à la belge " alors. Striker Bob est d'ores et déjà sélectionné au Festival International du Film fantastique de Bruxelles, rien d'étonnant. Réussir son coup en s'attaquant à un thème aussi éculé n'est pas évident.…
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Affreux, sales et méchants
Enfance pas plus géniale pour la petite héroïne de Noël au balcon. Mal fagotée, la peau du cou coincée dans le zip d'un K-way vinyle vert pomme, elle est traînée par une mère ultra-maquillée, jusqu'à la maison unifamiliale du cher ex, père de la petiote.
Dans ce temple du mauvais goût caricaturant les seventies avec brio (costumes, décors...), Noël réunit une collection rarement égalée de "beaufs", de mamies pleurnichardes et de Playmates 1973 prêtes à se crêper le chignon pour le moindre sein qui pendrait un peu plus que l'autre. Entre ces clones de Deschiens, l'ambiance électrique frise l'hystérie…
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Le Magnifique
Au sortir de la projection de Raymond la science, j'ai vu s'émouvoir le sorcier, Raymundo (Goethaels)... En imperméable de cuir noir, le mythe. Pourtant, si le réalisateur David Mileikowsky se laisse déborder par son admiration pour un "maître à penser" si haut en couleur, le documentaire n'en est pas moins modeste, et extrêmement classique.
Greffant des images d'archives sur un entretien en face à face, il construit la rétrospective de cette fabuleuse carrière de façon à nous faire revivre la tension croissante, jusqu'à l'émotion explosive du couronnement : quand Bernard Tapie l'appelle à la rescousse d'un Olympique…
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Le vieil homme et la terre
Dans un nouveau rôle d'affreux petit con sans conscience ni scrupules, Benoît Poelvoorde revêt cette fois la panoplie très belge de l'organisateur de courses cyclistes : pris de court par un désistement de dernière minute, il bave frites et mayonnaise et débite ses âneries devant le home où il vient dénicher un remplaçant bénévole...
Déjà primé un peu partout, Le Signaleur est pourtant très loin de se limiter à un dernier sketch du fameux Ben... Poésie de la rime visuelle : sur le visage absent du vieux, les rides profondes l'associent aux sillons des champs où la camionnette le dépose avec brassard…
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La maîtresse du hasard
Rappelant le Charles Denner de L'homme qui aimait les femmes, Etienne (Licinio Da Silva) est un doux rêveur qui promène son regard naïf et innocent de jolies blondes en jolies brunes.
A l'affût d'un sourire timide ou d'un coup d'oeil en coin, il déambule en cet après-midi d'été, à travers un Bruxelles lumineux et surréaliste : plusieurs fois, d'étranges coïncidences mettent sur sa route une jeune fille aux airs candides, puis empêchent le contact.
Heureusement, par un même et magique concours de circonstances, ils se trouveront enfin. Il était temps : ce grand enfant qui ne peut se résoudre à dormir seul…
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Baptiste, muet comme une carpe
Vous ne supportez plus la solitude ? Sous le couvert d'une farce absurde, Yves Cantraine vous aura prévenu : ne prenez surtout pas un poisson rouge !
D'accord, c'est propre, mais quand il s'appelle Baptiste et que ce boudeur ne daigne pas vous accorder le moindre regard ni faire une vaisselle, il y a de quoi péter les plombs.
Poussé à bout de nerfs, hirsute et mal rasé, le regard vitreux et hagard, on frise la dépression, et il faudra trouver quelque part au fond de vous la force d'en finir, de jeter par la fenêtre cet aquarium dans lequel, en fin de compte, vous vous parlez à vous-même. Ce premier avril, Baptiste fait sur le trottoir ses ultimes soubresauts.…
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Poste Restante
C'est le film la Carte postale de Vivian Goffette, sélectionné à Clermont-Ferrand, qui a obtenu le Prix Canal + de cette 18ème Compétition Nationale du Court Métrage. Hautement convoité pour ses retombées en termes d'audience (la diffusion des oeuvres est assurément un souci majeur pour les court métrages), ce prix consiste en l'achat des droits du film pour un passage télé.
La Carte postale débute bien évidemment autour d'une carte. Postée aux Antilles, elle est adressée par un père à son fils. On saisit rapidement que la mère et son enfant s'apprêtent à partir pour la messe des funérailles du père…
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Dark Crystal
Troisième court métrage du réalisateur d'origine luxembourgeoise Dan Wiroth, présenté au 25ème Film Festival Brussels, le film Fragile a reçu le Prix Sabam du 25ème anniversaire.
Dan Wiroth a délaissé l'animation traditionnelle après Berlin 2017, son travail de fin d'études à la Cambre, lui aussi déjà primé au Festival de Bruxelles en 1996.
Dans Crucy-Fiction, réalisé en 1997, un premier film auto produit et couvert de prix, il mettait en scène l'improbable danse de couverts en inox.
Pour Fragile il a choisi comme défi de mettre un matériau peu exploité en animation : le verre, mis en mouvement grâce…
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Le récent Festival International du Film Francophone de Namur programmait dans sa section documentaire les derniers films de Marta Bergman et Frédéric Fichefet, programmation attendue quand on se souvient du remarquable Bucarest, visages anonymes qu'ils cosignaient en 1994.
Dans Un jour mon prince viendra, Marta Bergman fait en pointillé le portrait de trois femmes roumaines qui par le truchement d'agences matrimoniales tentent de rencontrer l'amour et de quitter leur pays pour se marier à l'Ouest. Trois portraits qui sont autant de prétextes à interroger subtilement notre conception du mariage et sa faillite en termes de solitude. Dès la première séquence, Marta Bergman retrouve cette manière…
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"Pour connaître le monde, connais-toi toi-même." (Exorde aux humains venus chercher la vérité dans les Oracles de la Pythie de Delphes)
Charles Cuvelier est un homme qui a réussi. Parfait archétype du grand fauve des années 90, à qui l'agressivité, le mépris, la rudesse et l'égoïsme tiennent lieu de valeurs refuges, et grand spécialiste de l'art du paraître. Mais son super-costard, son coupé Mercedes bleu électrique avec GSM cachent mal qu'il n'est plus que la caricature de lui-même, à la poursuite du vent. Plongé dans une situation qui lui échappe, prédateur devenu proie, il devra déployer toutes ses ressources pour se…
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Le Chiapas, Thierry Zéno le connaissait bien avant 1994. En 1992, il avait réalisé Chronique d’un village Totzil, résultat de huit années d’approche d’une communauté d’Indiens Totzils, une des dernières tribus descendant des Mayas, vivant dans les montagnes du Chiapas, au Mexique.
Dès qu’il apprend la révolte paysanne, il décide de se rendre sur place pour témoigner des conditions de vie épouvantables qui ont poussé ces indiens méprisés que tout le monde croyait résignés à leur sort à se transformer en Armée Zapatiste de Libération Nationale.
Mais surtout, il entend leur donner la parole. Car si tout le monde connaît…
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