Il y a les gens pressés. Les gens lents. Les gens prudents. Les gens imprudents. Les gens distraits. Les gens curieux. Les touristes et les indigènes. L'homo faber, l'homo sapiens. Le timide et la coquette. Le parfumé à l'Aqua di gio d'Armani. La parfumée Obsession de Calvin Klein. Ceux qui ont des Ray-ban et ceux qui ont des sac ados en toile, griffé Eastpack. Celles qui ont des pantalons ultra-moulants Cargo et celles qui sont montées sur des buffalos de trois centimètres. Il y a les autres, les artisans du cinéma belge qui tournent un film Place Saint-Alix à Woluwé Saint-Pierre.
Je ne l'ai pas lu, je ne l'ai pas vu, j'en ai entendu causer. On peut le dire comme ça, en…
Lire l'article
Festival Filmer à tout prix
Au départ, un constat, celui d'une administration qui tourne à l'inverse de sa propre finalité. L'Onem, chargée d'assister les chômeurs se transforme en machine à exclure sur base de procédures inquisitrices d'un autre âge et sans souci apparent pour l'aspect humain de ses décisions, ni pour la détresse matérielle et morale immense dans laquelle se retrouvent parfois ses "victimes". Au départ, un désir : celui de mettre dans la lumière cette détresse, cette impuissance face à la force aveugle de la bureaucratie en marche, le plus souvent tenues à l'écart des caméras. Au départ, une histoire…
Lire l'article
Après le décès de son grand-père, Didier vide sa maison. Soudain, il tombe en arrêt devant une caisse remplie de papiers jaunis: livres de comptes, carnets de notes, documents administratifs, vieux de cinquante ans, plus parfois. Des noms d'inconnus, des bouts d'écriture, des fragments d'objets, traces de personnes à jamais disparues dont le souvenir s'estompe lentement dans la poussière et l'odeur de vieille encre. Une fois cette boîte jetée, il n'en restera plus rien.
Cette ultime rémanence fascine Didier. Ces traces, il les extrait de leur gangue de carton, les palpe, les dispose autour de lui et, petit à petit, dans son esprit de peintre naissent des images, des corps, des visages…
Une…
Lire l'article
Visions et visages
Crée par Philippe Reynaert (l'homme aux lunettes blanches de Télécinéma sur la RTBF), Visions revue belge de critique du cinéma est née en septembre 1982 et a disparu (hélas, trois fois hélas) en juin 1987.
Une aventure de cinq ans qui a rassemblé les meilleures plumes de l'époque et dont, pour la plupart d'entre eux, vous continuez à lire la prose dans vos hebdos ou mensuels favoris. Autour de Philippe Reynaert, rédacteur en chef du mensuel, on trouvait, Philippe Elhem, Louis Danvers, Charles Tatum Jr., Jacqueline Aubenas, Henri Sonet, Noël Godin (si, si), Paul Davay, Geneviève Robillard et Geneviève Payez. Auquels, au fil des mois viendront s'ajouter,…
Lire l'article
Scénario mon beau souci
Je ne sais pas qui continue à prétendre qu'il y a une crise du scénario en Belgique. Du scénario en béton, peut-être bien, mais comment voulez-vous modeler le béton pour en faire de la pellicule et donc un film? Vous en connaissez ? Moi aussi (Christophe Colomb, Wild Wild West, etc.).Vous les avez vus ? Moi non plus. Chaque fois je m'endors pendant la première demi-heure. Comme je ronfle, je m'attends à être réveillé brutalement. Pas du tout. Tout le monde dort. Quel concert. Vous avez beau avoir la stéréo, dans la salle, avec le système THX de Georges Lucas. All you need is sleep.
J'ai plutôt l'impression qu'il y a une…
Lire l'article
Au pays des merveilles
Parfois dans la grisaille des films qui collent à notre quotidien, surgit un film rare qui nous éclaire comme un soleil et nous fait ressentir ce que la vie a de beau et de libre. Lettre d'un cinéaste à sa fille, le dernier film d'Eric Pauwels, est de cette qualité - là et touche à ce que le cinéma a de plus de fort et de plus vrai.
Véritable tour de force d'écriture, en état de grâce permanent, cette lettre cinématographique au "je" si personnel, dépasse de loin le simple propos d'un père à sa fille. Elle réussit à nous rendre manifeste, au-delà de toute attente, l'essence même d'un savoir fragile fait…
Lire l'article
La mondialisation par le petit bout de la lorgnette
En 1999, Levi's, la première marque de jeans au monde, qui a attaché son nom à plusieurs générations grâce à une image de liberté, d'aventure et de rébellion, met en place un plan de restructuration radical. Au programme, la fermeture de dizaines d'usines, dont treize aux Etats-Unis et, pour ce qui nous concerne, trois en Belgique et une en France. Raisons invoquées: surproduction, coûts trop élevés, baisse des ventes de jeans. Mais alors qu'elle avance, la main sur le cœur, ses difficultés économiques, la multinationale crée des filiales en Turquie et en Amérique latine, et sous-traite sa production…
Lire l'article
La prisonnière ?
Une mer noire de nuit, gonflée d'une vague lourde et lente qui roule, houleuse de tensions retenues, puis chute, s'écroule pour recommencer encore et toujours ce même mouvement immuable et comme captif de lui-même.C'est avec cette image symbolique d'un présent hors du temps, obscur et brassé de ténèbres, que Chantal Akerman commence son dernier film, la Captive. Cadré à l'extrême limite de l'enfermement, ce premier plan situe d'emblée l'espace imaginaire de son récit, un lieu clos, au motif récurrent dont il est impossible de sortir.
Pourtant dès le second plan, Chantal Akerman oppose à cette impression d'emprisonnement…
Lire l'article
Koksijde
L'âme erre ? Oups ! La maire ? hum ! La mère ? Mmmm ! L'amer ? Hips !Lame R ? Ouah ! La mère ? Oouuii ! Gagné ! Nous sommes à Coxyde, à la mer du nord, avec un vent glacial et une alternance de nuées et d'éclaircies qui font grimper la consommation de Kleenex. Sept ados encadrés par deux monos sont assis, en rang d'oignons, sur la rambarde qui longe la digue, dos à la mer. Ils sont déprimés parce que les ados n'arrivent pas à décrocher le moindre petit boulot qui puisse servir à payer leur stage de char à voile. Pas de thune, gros problèmes.
En face d'eux, un travelling sur lequel glisse une dolly Panther portant une Arriflex SR3 avec…
Lire l'article
Terre de tourmentes et de martyre depuis bientôt dix ans, l'Algérie a besoin que se brise la chape de silence qui, peu à peu, s'est refermée sur elle.
Belkacem Hadjadj est l'un de ces courageux cinéastes algériens qui ont la rage de retourner au pays pour y tourner encore, et témoigner dans des conditions difficiles d'un quotidien bouleversé. Il s'attache ici aux pas de Soumicha, une mère de trois enfants qui, à la mort de son mari, pour faire bouillir la marmite, s'est lancée avec la R4 du défunt dans le métier de taxi. A Alger, l'histoire eût encore passé pour commune, mais là, loin dans l'ouest, au pied des basses montagnes de l'Atlas…
Lire l'article
Chronique d'une journée de la vie quotidienne de deux jeunes femmes, l'une belge, l'autre d'origine marocaine. Lynda et Nadia sont collègues. Tôt le matin, elles se réveillent dans leurs familles respectives et se préparent à se rendre au travail. Elles font le chemin jusqu'à Bruxelles dans la voiture de Lynda. A midi, pour oublier un peu l'abrutissement de ce boulot répétitif de télé-opératrice, elles s'échappent pour aller faire les boutiques chics de l'avenue Louise et l'avenue de la Toison d'or. Pour regarder, bien sûr. Le soir, elles reprennent l'auto et retournent à la maison…
En filmant cette complicité quotidienne…
Lire l'article
S'emparant d'une situation directement empruntée à l'actualité, la lutte des sans-papiers, sans logis, le réalisateur et scénariste Luc Bourgeois profite de ce cadre pour monter en spirale la prise de position en leur faveur d'un curé sensibilisé à cette détresse.
Au hasard d'une confession tardive, notre curé sera mis en contact avec Jojo l'Anguille, spécialisé dans le vol de toiles de maîtres. De cette rencontre incongrue naîtra dans la tête du confesseur l'idée d'organiser le vol (une gentille escroquerie à l'assurance) d'un tableau du XVIe°siècle, fierté de sa petite église, pour faire face aux frais…
Lire l'article
Myriam Garfunkel, a collaboré au Magazine Cinergie dans les années nonante. Elle était déjà atteinte de la longue et pénible maladie qui allait nous la ravir. Nous ne l'avons jamais vue se plaindre - parfois une grimace, vite réprimée, nous rappelait quelles souffrances elle endurait - mais être attentive à choisir l'angle le plus pertinent pour aborder le sujet ou le film que nous lui demandions de traiter. Il y a trois ans, ses parents ont créé Le Fonds Myriam Garfunkel, géré par la Fondation Roi Baudouin, qui a pour but en perpétuant sa mémoire d'apporter une contribution à la conservation et à la restauration des films archivés à la Cinémathèque… Lire l'article
12 septembre, Forest
VVVvrrrriiiii. Qu'est-c'est-k'ça ? Bang ! Le crash. Une épaisse fumée enveloppe deux véhicules. Cling-clang. Une portière. Un mec furibard sort de sa bagnole. Une furie. "Alors ? !". Un dingue, (petit, un peu rond, binoclard, les cheveux en bataille), courant, non, virevoltant, speedé à la vitesse pure, genre Michael Schumacher du mollet, tandis que la conductrice choquée, pas ici, ailleurs, s'extrait de son véhicule bleu navy.
Au ralenti. Hébétée, un peu triste, l'âme vagabonde, genre fêlée nostalgique. " Vous êtes folle ou quoi ? Vous venez de la gauche et en plus"-il plisse les yeux ébahi et murmure : "Tu es Mireille, on a été…
Lire l'article
Une mise en situation par des images d'actualités retraçant la guerre 40-45, l'occupation et la libération finale pose le film, dès le générique, sur le plan de la mémoire.
Un grand-père et son petit-fils devisent en se rendant à l'enregistrement public d'une émission de radio ayant pour invité un auteur racontant ses proustiens souvenirs de guerre (son seul souvenir de guerre est que son gâteau promis pour ses dix ans lui fut ravi par la Libération). La superposition des trois personnages, l'enfant, le grand-père et l'écrivain onaniste, nous mène vers un questionnement par rapport au vécu, sa transmission et l'Histoire avec un grand " H…
Lire l'article