Contre l'oubli
Il y a d'abord le noir et le silence, puis vient la mémoire, la mémoire de la douleur et cette alchimie particulière de celui qui se souvient au fil du temps, de ses rencontres et de ces moments fragiles où dans l'écoute de l'autre, disparaissaient soudain cette pesanteur du silence, cette peur des mots trop lourds à porter et cette angoisse des ténèbres. C'est seulement alors, dans cet instant du souvenir, que peuvent naître les sons et les images, les intentions et les enjeux, et cet art du cinéma qui nous fait prendre corps avec celui qui raconte et partager avec lui un instant de résistance à la noirceur du monde.
Wild Blue, le dernier film de Thierry Knauff,…
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Heartbreak boucherie
Il y a Rita. Il y a sa mère, Nicole. Il y a la petite boucherie familiale que Nicole tient à bout de bras sans pouvoir l'empêcher de péricliter, seule, depuis la mort de son Léo de mari, il y a dix ans. Entre les deux femmes, ce drame (la mort du père) pèse. Les blessures du quotidien, sans cesse exacerbées par les peines de l'absence et la culpabilité diffuse, finissent par empoisonner l'atmosphère au point de la rendre invivable. Pour Rita, une seule solution: s'en aller. Sa mère, elle, est terrifiée à l'idée d'envisager cette hypothèse. Que faire quand, pour se dire qu'on s'aime, la douleur ne laisse que les mots nés…
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Les ateliers de production, spécificité belge, unique en Europe, coproduisent, promeuvent et distribuent depuis plus d'un quart de siècle près de 500 films, des œuvres de création de documentaires courts, moyens, et longs métrages en film et en vidéo. Etonnant et détonnant, non seulement que nous ayons un style, mais que l'Europe des festivals le reconnaisse en récompensant nos talents. Le C.B.A. à Bruxelles et le W.I.P. à Liège produisent en intervenant à plusieurs niveaux : aides financières, aides en services et matériel, promotion dans les festivals, diffusion dans les salles et surtout distribution en télévision. Actuellement, elles connaissent une crise… Lire l'article
L'affaire Lumumba fut vécue en Belgique comme l'épisode le plus douloureux de la décolonisation. Chez les bourgeois, on se souvient encore de la "haine hystérique" soulevée contre "ce nègre à barbiche de chèvre".
A gauche, l'indignation provoquée par le traitement réservé au "frère socialiste, immolé pour cause de communisme", prévaut encore.
Il a fallu près de quarante ans pour qu'on ose enfin s'interroger officiellement sur la part de responsabilité des autorités belges dans ce monstrueux assassinat. Et au Congo, les répliques des convulsions qui agitèrent le pays sont toujours discernables dans ses déchirements d'aujourd'hui.…
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Madame de Maintenon et ses filles
A la fin du XVIIe siècle en France, Madame de Maintenon, devenue à force d'intrigues l'épouse du Roi Louis XIV, réalise son rêve: créer une école où 250 jeunes filles nobles mais désargentées ou orphelines de guerre recevront la meilleure éducation afin de les préparer au monde. Acquise à l'idée de former une élite féminine, elle veut selon ses termes "le contraire d'un couvent: un lieu où les idées bouillonnent, où souffle l'esprit".
Mais les années passent, les petites filles deviennent de jeunes femmes auxquelles ces messieurs de la cour commencent à s'intéresser…
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Costume sombre, chemise sombre, cravate sombre, Nike aux lacets défaits, Victor (Stéphane Guerin-Tillie) appuyé contre la portière du break, affiche un air soumis : "Tu vois, ça aussi, c'est la base du métier ". L'envol soudain d'un pigeon dans un fracas d'ailes battantes fait grimacer Olivier Hespel, l'ingénieur du son. " Et Marchand le sait très bien " rétorque Francis en sortant du champ de la caméra." Coupez ! On va faire un pick-up à partir de " Marchand le sait très bien, c'est pour ça qu'on y va tout de suite". dit d'une voix posée Jean-Paul Lielienfeld, le réalisateur, pantalon cargo clair et polo noir. Le soleil est filtré par un large… Lire l'article
En vacances, le second long métrage de fiction d'Yves Hanchar, a fait l'ouverture du Festival de Namur. Nous vous en parlerons lors de sa sortie en salle. Vous êtes impatients de lire notre point de vue ? En attendant, nous avons sélectionné avec le réalisateur dix polaroïds pris par Josiane Morand, la scripte du film, et commentés par Yves Hanchar. Album de famille. Jeu de l'oie autour de souvenirs de vacances studieuses.
1. Le groupe
Il aura fallu finalement trois ans pour les réunir.
D'auditions, de rencontres en reports de tournage, voici le résultat du casting d'En vacances.
Mes douze petits personnages. Six Français, deux Belges, deux Canadiens, un Italien.
Personne ne connaissait personne.
Pour…
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Famille je te hais
Sophie, post-adolescente roulée dans la fausse soie d'une petite vie bourgeoise, vivote en solitaire malgré la présence financière d'un petit copain emballé bcbg et aussi passionnant qu'un mauvais épisode de Dallas. Un matin, des flics lui apprennent que son père, cavaleur notoire et qu'elle n'a pas vu depuis dix ans (on découvrira par après que son passé familial est loin du rose aimant) est recherché pour meurtre et reste introuvable.
Au commissariat, elle se découvre une demi-soeur, sorte de ready-made de jeune beur dont la phrase slogan et qui la résume totalement claque toute les vingt secondes : "J'en ai rien à foutre". Leur rencontre…
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Nous avons soutenu Dernier Plan dés sa projection au Festival de Bruxelles 2000. Le film de Benoît Peeters vient de sortir en salles. L'occasion pour Cinergie d'y revenir en demandant à Benoît Peeters les réflexions que lui inspirent sept mots-clefs du film.
Amnésie
" L'histoire d'un homme qui voulait oublier sa vie et à qui un autre vient la raconter": pour l'instant, je n'ai pas trouvé de meilleure façon de décrire Le Dernier Plan. En ce sens, oui, c'est un film sur la mémoire, et sur l'exil qui est un autre nom de l'oubli. Et notamment sur l'effacement si rapide de ce monde que l'on disait naguère de " l'Est ".
Voyager à Prague, à…
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Le cocktail Benoît Lamy : un mélange de coup de cœur (pour lui l'émotion est une vertu) et de provocation spontanée. Son talent : la sincérité. Réalisateur, producteur, président du CBA, il taille un costume aux certitudes formatées de langue de bois. Tenace, il jette rarement l'éponge. Tout petit, à Arlon, où il est né, son premier choc cinématographique a lieu en découvrant les dessins animés qu'il va voir avec ses trois frères.
Le cocktail Benoît Lamy : un mélange de coup de cœur (pour lui l'émotion est une vertu) et de provocation spontanée. Son talent : la sincérité. Réalisateur, producteur,…
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L'Heure du leurre
Conversation
Soit Les Ménines de Velasquez (1656). Une sorte de chronique de la vie de cour au centre de laquelle figure l'Infante d'Espagne et, dans le tableau, à droite, Velasquez regardant non pas son modèle (l'infante) mais le spectateur. Ce tableau a inspiré à Michel Foucault un chapitre des Mots et les Choses devenu célèbre. Il y analyse la captation du regard du spectateur par le peintre, son entrée dans le cadre de l'image.
Le peintre
"Au moment où ils placent le spectateur dans le champ de leur regard, les yeux du peintre le saisissent, le contraignent à entrer dans le tableau, lui assignent un lieu à la fois privilégié et obligatoire, prélèvent…
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On a parle peu (hormis dans les revues spécialisées comme Synopsis) et cependant le scénario est une étape décisive de l'écriture narrative d'un film. Luc Jabon vient de publier dans les n° 25 et 26 de Répertoires un texte qui excitera - n'en doutons pas - la curiosité de tous les professionnels de l'écriture scénaristique et de nos fidèles internautes qui ont déjà eu l'occasion de faire connaissance avec l'auteur.Il y a quelques temps déjà, nous nous étions promis de revenir sur ces procédés typiquement scénaristiques que nous utilisons dans notre écriture, parfois sans même nous en rendre compte. Y revenir pour… Lire l'article
L'Offrande musicale
Je suis aujourd'hui convaincu que c'est l'insécurité qui rend l'art intéressant. – Paul Van Nevel
Après Philippe Herreweghe, et le verbe s'est fait chant, un documentaire passionnant et passionné consacré à l'un des pionniers du renouveau de la musique baroque, Sandrine Willems s'attaque à l'une des "stars" du renouveau de la polyphonie de la Renaissance : Paul Van Nevel himself.La polyphonie qui utilise quatre voix (superius, altus, ténor, bassus) a été considérée, de Josquin des Prés à Palestrina, comme l'ars perfecta. " Cet "art parfait", explique René Jacobs, était celui des…
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Epouvanté par l'hypocrisie générale du pays, et le sens des conventions d'une bourgeoisie étriquée qui méprise artistes et écrivains, Charles Baudelaire s'écrie : " En Belgique pas d'Art ; l'Art s'est retiré du pays. Pas d'artiste excepté Rops " (1). Et d'ajouter dans un sonnet : " A dire là-bas combien j'aime/ ce tant folâtre monsieur Rops/ Qui n'est pas un grand prix de Rome/ Mais dont le talent est haut comme/ La pyramide de Chéops " (2). Félicien Rops, un artiste dans tous ses états, qui a mis plus d'un siècle pour être reconnu dans son pays natal. Cette reconnaissance, on la doit en partie aux Muses sataniques,… Lire l'article
Epouvanté par l'hypocrisie générale du pays, et le sens des conventions d'une bourgeoisie étriquée qui méprise artistes et écrivains, Charles Baudelaire s'écrie : " En Belgique pas d'Art ; l'Art s'est retiré du pays. Pas d'artiste excepté Rops " (1). Et d'ajouter dans un sonnet : " A dire là-bas combien j'aime/ ce tant folâtre monsieur Rops/ Qui n'est pas un grand prix de Rome/ Mais dont le talent est haut comme/ La pyramide de Chéops " (2).
Félicien Rops, un artiste dans tous ses états, qui a mis plus d'un siècle pour être reconnu dans son pays natal. Cette reconnaissance, on la doit en partie aux Muses sataniques, un…
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