L'Amour vache
Nous sommes dans un studio de montage de la RTBF. Denise Vindevogel, la chef-monteuse, manipule la copie de Combat de fauves sur une Steenbeck 35mm stéréo. Benoït Lamy, le réalisateur, observe attentivement l'écran, formaté 1.85. Ça démarre avec un plan large, en plongée, sur Richard Bohringer couché dans un ascenseur et qui, manifestement, ne va pas bien. " Il est collapse ", remarque, pince-sans rire, Benoît Lamy. Ute Lemper l'observe, tandis qu'il lui dit off : " Je rêvais, c'était bien, je crois bien. Je me demandais ce que devenait un prisonnier dans son cachot... Je crois bien qu'il devient poisson ou oiseau ". Sourire d'Ute.…
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Liberté couleur de femme
Le dernier film de Vicente Arande est intitulé Libertarias en hommage à - et en mémoire des - luttes libératrices des femmes en 1936. La distribution fait donc la part belle aux femmes, avec Ana Belen, Victoria Abril et Adriana Gil dans les rôles principaux. Fresque historique crédible et superbement mise en scène sur fond de guerre civile, le film nous entraîne dans une petite ville près de Barcelone où une jeune soeur trouve refuge chez des prostituées pendant le saccage de son couvent par les colonnes de Durutti.
Parfaite ingénue, Maria se rapprochera de ses nouvelles compagnes et plus particulièrement de la chef du commando de féministes, les libertarias, un…
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Le son est au bout de la perche
Le perchman est un passeur. Non de lumière mais de sons. Ombiliquement relié à l'ingénieur du son lors d'un tournage, il se penche au plus près des voix et des corps. Les hurlements d'un parquet qui grince, les vibratos d'un timbre vocal, les murmures d'une promesse, la couleur pastel du silence. La vie de sons prélèvés au moment de la prise de vue, dans la captation directe de l'émotion et de la vérité. Rencontre avec Olivier Hespel, assistant son sur Toto le héros, Abracadabra, ou encore La Vie des morts d'Arnaud Desplechin.
Cinergie : Que dit-on? Perchiste ou perchman?OlivierHespel : Perchiste, ça fait un peu lampiste,…
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L'amour filial
Dans la banlieue de Bruxelles, Josée Dayan achève le tournage de Victor et François. De l'extérieur, rien ne laisse présager que dans cette rue tranquille d'Humbeek, au bout d'un sentier boueux, surgira une gentilhommière, qui abrite depuis trois semaines une équipe d'une trentaine de techniciens de cinéma. Dans le parc, les rails d'un travelling courent le long de la façade. La caméra Arriflex SR3 est posée sur une tête télécommandée animée par une grue scorpio que manipulent les machinos de la Sotrac. Elle cadre Sandrine (Sabrina Leurquin), guettant à sa fenêtre le départ de Philippe (Jean-Marc Petiniot). Celui-ci…
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L'homme des quais
Décembre 1996. Paul Carpita est à Bruxelles. Invité par la biennale du Cinéma Méditerranéen à venir présenter son dernier film, les Sables mouvants, le réalisateur marseillais honore également de sa présence le séminaire mis sur pieds à l'INSAS par Patrick Leboutte sur le thème du "peuple acteur", où l'on projette son premier film le Rendez-vous des quais.
Centré sur un événement emblématique de la résistance populaire à la guerre d'Indochine, le film a fait l'objet, à sa sortie en 1955, d'une interdiction de projection et d'une saisie brutale de la part du gouvernement français…
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De l'art et essai à l'humour félin et médical
Fils du directeur de Progrès Films, Philippe Geluck a préféré le dessin et l'écriture au cinéma. Le Chat et le Docteur G. lui ont donné raison. Explications.
Cinergie : Enfant, vous baigniez dans le cinéma... Philippe Geluck : Oui, mais dans un certain cinéma, dans celui que distribuait Progrès Films. Un cinéma de qualité, beaucoup de films en provenance des pays de l'Est parfois étonnants pour un enfant. Nous n'avions pas la télévision mais mon père ramenait de temps en temps un projecteur 16mm à la maison et organisait des projections de films en général…
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" Moteur ! Tourne ! Sept sur un, première ! "... Clac ! et le clapman s'éclipse. " Action! " Blimpé, le moteur de l'Arriflex tourne silencieusement. Le perchman tend son micro. " Qu'est-ce qu'on a comme artillerie? " Le général se tourne vers une carte d'état-major. " La neuvième, mon général ", rétorque le colonel, tandis que la caméra recule et fait un mouvement en arc de cercle pour cadrer la table autour de laquelle une demi-douzaine d'officiers écoutent attentivement le général.
" Nous devons les amener là , dit le général en pointant son doigt à un endroit précis…
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Un pari capital
Lieu de rencontres et d'idées, l'Atelier des Jeunes Cinéastes existe depuis plus de vingt ans. Son catalogue est riche de près de soixante films. Grâce à une structure souple et légère,l'AJC n'a cessé d'initier et de produire les projets de réalisateurs aussi différents que Boris Lehman, Alain Berliner, Michel Caulea, Harry Cleven, Hubert Toint et bien d'autres. Après le départ d'Anouchka Dewarichet, Katty Welkenhuyzen en est devenue le producteur exécutif. Nous l'avons interrogée sur Capital court et les ateliers de scénario et de comédiens.
Kathy Welkenhuyzen
Le projet Capital court est avant tout un nouveau mode…
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Cher Gabriel
Ça démarre sur des images en noir et blanc qui parfois sont nettes, parfois floues ou qui sautent comme si certaines d'entre elles avaient été avalées par le temps. Une voix off nous conte : " Il était une fois, dans un monde aujourd'hui disparu, un monde à la fois chic et sévère d'avant 1940, il était une fois un homme, Gabriel... " Et la voix d'Anne Levy-Morelle, la réalisatrice, poursuit : " Gabriel était un monsieur comme beaucoup d'autres dans un monde que je n'ai pas connu et dont je ne sais que très peu de choses. Cher Gabriel, vous étiez né quelques semaines à peine avant le vingtième siècle... "…
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L'homme qui filmait les femmes
L'amateur est un monsieur d'apparence normale dont le seul plaisir consiste à filmer nues, dans son appartement, des femmes abordées dans la rue. Les choses en restent là, car la passion de cet homme tient plus de la collection que du fantasme sexuel.
Pour Olivier Smolders dont c'est le huitième film, cet argument minimal était prétexte à refaire une série de portraits de femmes (un motif qu'il avait déjà traité mais sur lequel il souhaitait revenir), étant entendu qu'il ne s'agissait pas de présenter une galerie flatteuse de jeunes femmes plus ravissantes les unes que les autres, mais d'aller de la jeune fille à la femme…
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Bonne fête, Paulette !
Caroline Rottier reçoit des mains d'Anne Moralis les dernières retouches d'un maquillage particulièrement complexe. Les cheveux attachés sous une perruque à l'anglaise, le visage pâle, aux lèvres foncées et aux yeux très maquillés que souligne de faux cils à la Garbo période muette, elle se fait ajuster une longue robe conçue par la costumière Isabelle Lhoas. Un miroir Art déco lui renvoie l'image d'une beauté des années folles faite à croquer. C'est qu'elle interprète Madame Zebrinska, une artiste russe dont l'univers féérique fascine Paulette, la jeune héroïne de Noël…
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Bijou d'amour
La caméra glisse sur le rail du travelling, cadre Fanny (Sandrine Bonjean) et Greta (Babette Jouret), la joaillière qui sort une bague de la vitrine et la présente à sa cliente.La caméra s'élève et recadre en plongée le sol sur lequel se dessine, à droite de l'image, l'ombre portée du sigle de la bijouterie.Et voici que, par un artifice d'éclairage, le reflet se déplace vers la gauche pour évoquer la courbe du soleil et le temps qui passe. Sans interruption, la caméra redescend cadrer Fanny et Boris (John Dobrynine) qui entrent quelques heures plus tard dans la bijouterie. C'est un raccord-temps subtil qui n'est pas sans évoquer celui de…
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La mémoire du cinéma
La Cinémathèque Royale de Belgique est riche de milliers de kilomètres de pellicule. Ce temple du celluloïd est la caverne d'Ali-Baba des cinéphiles et des jeunes réalisateurs qui ont sans doute connu leur premier coup de coeur cinématographique dans les fauteuils orange de la salle de projection du Musée du cinéma. Après Jacques Ledoux que nous avions longuement interrogé jadis (cf. Cinergie nos 40, 41, et 42), nous avons demandé à Gabrielle Claes, directrice de la Cinémathèque royale de Belgique, de faire un tour d'horizon des collections et de leur état de conservation.
Gabrielle Claes
L'essentiel de l'activité…
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François Schuiten ou la tentation du cinéma
Au début de 1993, le dessinateur François Schuiten et le scénariste Benoît Peeters, les inséparables duettistes de la série BD Les Cités Obscures, publient un livre dont le format à l'italienne renvoie à l'écran cinéma, Souvenirs de l'éternel présent.
Il s'agit d'une variation autour du film de Raoul Servais Taxandria, auquel ils ont l'un et l'autre été associés. Trois ans et demi plus tard, ils publient un essai écrit à quatre mains, L'Aventure des images, dans lequel ils se livrent à une réflexion sur le statut et la valeur de l'image aujourd'hui…
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L'Europe contre-attaque ?
Enseignant et chercheur à Paris I- Sorbonne, cinéaste, Frédéric Sojcher a récemment dirigé un ouvrage intitulé Cinéma européen et identités culturelles. S'il s'agit de cerner au plus près la nébuleuse cinématographique des quinze à travers de nombreux témoignages de professionnels (cinéaste, historien, sociologue,...), l'auteur esquisse aussi sa propre vision et synthèse de la question. Et en bruit de fond, encore et toujours, le tintinnabulum du tiroir-caisse des Majors hollywoodiens. Deux ans après le GATT et l'exception culturelle, rien n'aurait-il changé?
Cinergie : Dans ce double mouvement d'identité…
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