Nous sommes à l’Hôtel Ragheno, à l'angle de l'avenue Fonsny et de la rue de Russie, à un jet de pierre de la gare du midi. Au deuxième étage s’active l'équipe du Pressentiment, premier long métrage d’Alex Stockman. Les couloirs sont encombrés de cartons pleins de matériel de machinerie, des câbles jonchent le sol en vinyle pour alimenter les HMI. Nous sommes dans une chambre aux murs gris clairs, avec un lit recouvert d'un édredon rose qui montre sa trame. En face un poste de télévision est suspendu au plafond. Dans un recoin, un évier surmonté d'un miroir est dissimulé par une tenture. Une fenêtre et une porte-fenêtre laissent… Lire l'article
Quelque part à Molenbeek, dans les greniers gigantesques d'un ancien entrepôt transformé en salle de spectacle. Sur la scène, quatre mecs en jeans et tee-shirts cradingues transpirent en grattant quelques notes sur leurs guitares électriques. Un groupe, un peu barge, qui oscille entre le Rhythm and blues et la Country. Edouard Molinaro, le réalisateur de Mon oncle Benjamin, se lève de son siège, observe la faune qui l'entoure et circule parmi les groupes qui papotent, font circuler les rumeurs. Ils sont surlookés, les mecs cheveux décolorés, pantalons cargos, tatoués, torses nus ou en tee-shirts mouillés de transpiration, les filles cheveux colorés, décolleté fait pour être… Lire l'article
Caméra à l'épaule, Michel Baudour propose un cadre à Marian Handwerker, le réalisateur du Don d'un frère. Celui-ci visionne le plan du film sur son écran de contrôle, tandis que Pierre Gordower place des réflecteurs pour renvoyer la lumière sur les deux acteurs qui se font face.
"Etes-vous sûr que Paul a été adopté? ", demande Simon Maillard (Olivier Ythier), pull rouge autour du cou sur une chemise à carreaux, face au Dr Sylvestre (Jérôme Anger), veste ocre sur une chemise jaune. Celui-ci le regarde droit dans les yeux et répond : "J'ai eu accès à son dossier". Un cycliste descend la rue et passe dans le champ de la caméra. "Sa mère…
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Pour paraphraser Don Westlake (1), tout le monde cherche quelque chose. Les hommes cherchent les femmes et vice et versa. Les cinéastes cherchent de la pellicule à impressionner, les scénaristes des idées à développer, les producteurs des sujets à finaliser et les acteurs des rôles à interpréter.Ce qui permet aux journalistes de trouver des infos à publier.
Voilà pourquoi, en cette froide journée de février, nous sommes rue de Belgrade, plus précisément dans une ancienne usine dont Pierre Lekeux a obtenu la jouissance sans autre loyer que l'entretien du bâtiment.
Ravi, il a décidé d'en faire les locaux de Radowski Films, une maison de production dont…
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Les acteurs répètent face à Harry Cleven, le réalisateur, canadienne imperméable jaune et foulard blanc, tandis qu'on change l'axe de la caméra. Bien que le froid serre la tête comme un étau, le regard d'Harry est vif (on dirait qu'il n'arrête pas de faire des repérages). La maquilleuse rectifie le make-up de Sofia (Dominique Bayens) à l'aide d'un correcteur de teint et d'un crayon haute définition, par souci du raccord juste. "Pas de souci ", dit l'assistant image en contrôlant à l'aide de sa mini maglite, le couloir du chargeur de l'Arriflex 16 SR3.
Celle-ci est montée sur un chariot SMF baptisé "Flinstone" et conduit par Marc…
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Les électros, les machinos, les stagiaires s'affairent avec application dans un froid que le vent rend plus aigu. Il prend la tête, pique les mains, engourdit les pieds. Les rails d'un travelling sont posés sur les pavés de la rue Gaucheret, pas loin de la gare du Nord. Ella Van den Hove, la cadreuse, installée sur une dolly, a l'oeil collé au viseur d'une caméra Aaton S16 munie d'un zoom Canon 10,5-50. Face à elle, dans le viseur de la caméra, une Citroën dans laquelle ont pris place les deux vedettes du film : Annie Cordy et Charles Aznavour.
SéquencesTake one. La voiture s'engage dans la rue, freine doucement, suivie par la caméra qui, l'accompagne jusqu'à l'arrêt…
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La vie rêvée des anges
Le grand blond à la veste en cuir et à la chaussure noire approche son visage le plus près possible de Véronique et la regarde droit dans les yeux sans rien dire. Crispée, Véronique (Olivia Brunaux), une rousse aux yeux émeraude, en cuissardes noires et manteau blanc ouvert découvrant le haut des cuisses, le dévisage silencieusement, sans cligner des yeux. Il la prend par le col, la soulève, puis la bouscule. Elle recule en titubant sous le choc, bascule, finit par tomber à la renverse. Véronique pousse un hurlement et s'écroule à terre (sur un matelas pendant les répétitions). Sitôt couchée au sol, elle adopte une position fœtale,…
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Shtong ! Enfin ! Des comédiens belges franchissent le Rubicon, bougent. Oubliés, marginalisés dans un artisanat - le cinéma belge - qui se transforme année après année en industrie et remporte de plus en plus de succès public et critique, les oubliés de l'histoire se rebiffent. Il était temps ! D'autant que sans eux, sans les personnages qu'ils incarnent, sans la chair qu'ils donnent à un film projeté "bigger than life" sur les écrans de nos multicomplexes, l'émotion des spectateurs n'existerait pas et le cinéma en serait réduit à être une série d'images inanimées, genre document en couleurs du Geographic Magazine ou collection… Lire l'article
Je débarque à Paris, gare du Nord, en provenance de Bruxelles. Une vague de brouillard obscurcit l'horizon. Je m'enfonce dans des brumes de rêve. Le plan de la ville-lumière en main, je me dirige vers la rue Saint-Quentin, à deux pas. L'hôtel des Belges est au numéro 35bis. J'entre dans un bâtiment aux murs décrépis, mangés par une espèce de suie, qui me font craindre le pire (lequel n'est jamais sûr contrairement à ce que certains laissent croire) et me dirige vers le bureau de la réception en m'attendant à tomber sur un vieux plouc à la démarche lourde, aux cheveux courts, aux ongles ras, découvrant des dents jaunies lorsqu'il… Lire l'article
Inséparables, ils se sont associés et ont démarré ensemble dans le cinéma à la fin des années septante en réalisant des reportages vidéo et des documentaires (Lorsque le bateau de Léon M. descendit la Meuse pour la pemière fois ou Regarde Jonathan). Jean-Pierre est à la caméra, Luc au son.
Longtemps assistants d'Armand Gatti, ils coproduisent Nous sommes tous des noms d'arbre, le film que ce dernier réalise en 1982, en Irlande du Nord et en Belgique. En 1986, les frères passent à la fiction, au 35mm et au long métrage et s'imposent avec Falsch, une pièce de René Kalisky adaptée à l'écran, suivi de Je pense à vous,…
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Il est 19h30, nous sommes dans une salle de montage située au sixième étage de la cité de la RTBF à Reyers, cette caserne labyrinthique et lugubre où des couloirs interminables succèdent aux couloirs - silencieux, déserts qui débouchent à leur tour sur des salles silencieuses et désertes. Assis derrière la console de mixage nous voyons défiler sur l'écran 16x9 quelques séquences montées de Mobutu, Roi du Zaïre. Le nouveau film que termine Thierry Michel mélange plans d'archives et plans d'interviews que le réalisateur de Donka a menées auprès des proches de Joseph-Désiré Mobutu.Le son est assez inégal mais c'est… Lire l'article
Still Alive
Ça a l'air d'un interminable couloir et ce l'est sauf qu'il y a plein de petits carrés sans fenêtres avec des tas de moniteurs vidéos, de boîtes de pellicule ou de bandes son, de boîtes en carton débordant de K7 vidéo VHS, d'écrans de toutes sortes. D'une pièce à l'autre, on arrive en fin de parcours à une sorte de salon. Assise à la table une fille décoiffée consulte un grand cahier à couverture toilée noire. Derrière elle, deux grandes fenêtres donnent sur la rue du Fort. Le reste de la troupe boit du café pour se réveiller et papote, tranquille.
Le téléphone sonne sans arrêt.…
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Le Choc des images
Rien ne laisse prévoir que dans une petite pièce du second étage d'un immeuble cossu de l'avenue Louise, se tourne Le Régime de Régine, un court métrage, sinon les lumières des HMI qui envoient une lumière réfléchie sur des panneaux recouverts de papier d'argent. "Neuf sur cinq, take one," dit l'assistant, clap en main. "Action". Régine (Sandrine Laroche), au bord des larmes, essaie de fermer la tirette de la robe qu'elle a enfilée et que vient de lui remettre Vincent mais elle n'y arrive pas.
"Mes amies disent que je suis folle, elles disent que tu es malade de me forcer à maigrir comme ça...Je n'ose même pas leur raconter l'histoire…
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Elle a des shoes à semelles bizarres, genre Spice Girls, des Buffalos ou des Knowbot, allez savoir! Elle a des cheveux blonds bouclés, un pantalon cargo à larges poches sur le côté et elle déploie un parapluie aux couleurs bigarrées sur la tête de Peter, le gamin qu'elle coache. A côté d'eux, la maquilleuse sort un paquet de clopes et un zippo (le briquet du cinéma et du G.I.) distribue le poison généreusement autour d'elle et l'allume. On est dans la banlieue de Halle, sous un ciel gris aux nuages menaçants, une atmosphère à la Hugo Claus, un peu glauque. Philippe Guilbert, le chef op, cadre sur son Arriflex SRII, Gérard Aerts (André Bayens), le père… Lire l'article
Un mince filet de fumée s'échappe des tuyaux. Un murmure rauque s'échappe de sa voix de baryton voilée par une grippe tenace. Mais tout le monde est attentif aux propos de Jean-Daniel Verhaeghe, le réalisateur des trois épisodes du Destin des Steenfort, la saga télévisée des Maîtres de l'Orge qu'il met en scène depuis le début et qui glisse : "N'oublie pas qu'on a tous vus Armaguédon !". Nous sommes dans les sous-sol des bains de Saint-Gilles. Christian Lebrun (Sébastien Tournay), revêtu d'un cache-poussière gris qui porte la griffe des années cinquante, se débat avec de multiples manettes et provoque des jets de fumée alarmant… Lire l'article