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Krump de Cédric Bourgeois

Publié le 28/06/2022 par Malko Douglas Tolley / Catégorie: Critique

En compétition au Brussels International Film Festival (Briff), le premier long-métrage de Cédric Bourgeois est un mash up de plusieurs genres. Du drame à la comédie satirique avec quelques moments gores, Krump gagne à être vu en salle, en festival ou avec un groupe d’amis. Si l’intrigue prend forme dans les bas-fonds de la pornographie bruxelloise, ceci n’est qu’un prétexte pour parler de manière décalée, subversive et amusante de la violence de notre monde, qu’elle soit physique ou financière.

Krump de Cédric Bourgeois

C’est dans une salle du Palace de Bruxelles bien remplie que Cédric Bourgeois est venu présenter son film et rendre un hommage plein d’émotion à sa maman qui l’accompagnait dans un cinéma éponyme durant son enfance. Et vu les nombreux rires et les sourires sur les visages des spectateurs en sortant du cinéma, son pari osé semble réussi.

En répondant à l’appel à projet du Centre du Cinéma, comme expliqué lors du tournage à Cinergie, ce long-métrage est synonyme de liberté pour ce réalisateur : « Moins on reçoit d’argent, plus on est libre de faire ce qu’on veut. Peut-être que je n’aurai plus jamais l’occasion de réaliser un film si librement dans ma vie », s’amusait-il d’ailleurs à dire lors de la présentation du film. Krump, c’est l’histoire d’une ancienne star déchue du porno prête à tout pour sauver sa fille adorée kidnappée par sa faute.

Avec une réalisation technique sérieuse et quelques plans spectaculaires de Bruxelles à l’aide de drones, les séquences s’enchaînent de manière dynamique du début à la fin. En tant que Bruxellois, le fait de reconnaître différents lieux emblématiques de la capitale comme le Palais de Justice, les Abattoirs d’Anderlecht ou encore les graffitis près du canal apporte un ancrage local intéressant. Ce projet transpire vraiment la belgitude.

Si l’on entend de plus en plus souvent des commentaires du genre « c’était bien mais un peu trop long » en sortant des salles obscures, Krump évite cet écueil en allant droit au but sans se perdre dans de longs dialogues inutiles. Le traitement de l’image ainsi que la bande son surprennent. Les 73 minutes du film défilent sans que l’on ne s'ennuie un seul instant.

La brutalité du monde qui nous entoure est la matière qui nourrit ce film. Si l’on s’amuse de cette violence et de l’horreur du récit grâce à la légèreté des dialogues, les sujets abordés le sont beaucoup moins : pornographie, déchéance civile, humiliation, vols, violence gratuite, drame familial, enlèvement, torture, etc.

Si le récit semble, par moment, complètement surréaliste, il est malgré tout troublant de réalisme. Il suffit de lire les faits divers d’un célèbre journal populaire pour comprendre que Krump ne fait que mettre en boite les aberrations de la société civile. Mieux vaut en rire qu’en pleurer est un adage qui sied bien à ce film. Le personnage de Krump, interprété avec brio par Jean-Benoit Ugeux, émeut par son approche simple et naïve de la vie. Ce Krump, c’est un cas social comme il en existe beaucoup plus qu’on l’imagine. Pas très malin mais pas totalement con. Pas très honnête, mais avec un bon fond quand même. Une fois associé à Jean-Jacques Rausin, on peut qualifier leur duo de détonnant. Krump fait partie de ces films qu’on ne voit pas tous les jours et qui ne rentrent pas dans les codes habituels du cinéma. Et c’est pour cette raison précise qu’il a tellement plu. Un beau coup de poker surprenant et amusant pour ce film à l’humour corrosif.

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