Cinéma et Mémoire
Un livre très intéressant de Marie-Aude Baronian sur les films d’Atom Egoyan, cinéaste canadien d'origine arménienne, vient d'être édité par l'Académie Royale de Belgique. Parmi les dix-sept longs métrages du réalisateur, parcourons-en trois.
Dans The Adjuster, un expert pour une compagnie d'assurance, Noah, rassure ses clients après les pertes de leurs biens matériels et répertorie leur valeur immobilière. Hera, sa femme, travaille dans un bureau qui examine et classe les films pornographiques. Elle-même filme en vidéo la projection sur l'écran de ces films pour les montrer à sa sœur. Sous le regard…
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Charles Spencer Chaplin, « Challychaplin », pour reprendre la belle expression de Garson Kanin, a nourri la vie de bien des enfants et d’adultes à travers le personnage de Charlot. Le célèbre vagabond aux pieds plats, à la petite moustache, au pantalon trop large, à la canne de rotin et au chapeau melon a désormais cent ans. Il a été créé en février 1914 dans les studios Keystone, à la demande de Mack Sennett. Le premier film s'intitulait, Charlot est content de lui. Unissant tragédie et comédie, le personnage de Charlot a connu immédiatement un énorme succès public. Un an après son apparition sur nos écrans, Ben Hecht le surnomme…
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Raoul Walsh, dans la vraie vie, était aussi actif que les personnages qu'il filmait et pour qui l'action prédomine. Voici un exemple pris dans son autobiographie (1). Lors de la soirée d'anniversaire, à Hollywood, du couple William Randolph Hearst et Marion Davies, un faux prince roumain repousse le magnat de la presse et danse avec Marion Davies, éberluée, qu'il se met à draguer. Pour la sortir de cette mauvaise passe, Walsh repousse le « prince » qui lui met la main au collet. Walsh lui envoie un direct à la mâchoire, et l'étend parterre. Le lendemain, Winston Churchill, qui était présent à la réception, l'approuve et lui dit : « C'est…
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Dans les années 60, la technique et l'esthétique du cinéma direct ont révolutionné le monde des images. En dehors du broyeur télévisuel, le reportage sur le vif a offert d'autres perspectives aux documentaires cinématographiques. Petite équipe, petite caméra, son avec un « Nagra » portatif.
Les passionnés et acteurs du cinéma direct composaient une constellation americano-franco-canadienne autour de Richard Leacock, D.A. Pennebaker – Jean Rouch, Mario Ruspoli – Michel Brault, Pierre Perrault.
Au moment même où Michel Brault vient de décéder, un livre intéressant sur les films de Mario Ruspoli auquel il a participé vient…
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Le cinéma documentaire résiste mieux aux entreprises médiatiques que les fictions qui ressemblent de plus en plus à des spots publicitaires qui nous parlent d'un monde plus virtuel que réel. Les gens qui vivent dans le réel ne cherchent pas nécessairement à ressembler aux stéréotypes qui leur sont proposés.
D'où l'importance des cinéastes documentaristes qui prennent le risque de montrer la complexité des gens, leur quotidien, sans vouloir les exhiber. Les gens ont des récits, des histoires à raconter en dehors du discours sur la réalité que montrent, en images, les publicitaires.
Dans les années trente du siècle dernier, le documentaire…
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N'ayant pas d'industrie, contrairement à l'Allemagne ou la France, le cinéma belge, dès ses débuts, s'est ancré dans un genre plus restreint que celui qu'offrent de vastes studios, le documentaire. Henri Storck, en le nommant "cinéma du réel" - dès les années trente - lui a donné un statut qui va au-delà du cinéma expérimental, autre genre artisanal également développé à cette époque, en Belgique.
Pour beaucoup de cinéastes - depuis l'invention du direct (image et son) - le partage se dessine plutôt entre le documentaire créatif (1) et le reportage télévisuel. Pourtant, la grande évolution a été…
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La nouvelle valse israélienne
Un film israélien ? Ceux qui répondent, de manière hasardeuse, Valse avec Bachir ont raison, certes, mais ils devraient parcourir le dernier essai de l’historien du cinéma, Ariel Schweitzer, Le nouveau cinéma israélien. Dans ce petit livre, agréable, très clair et bien illustré, l’auteur n’y va pas par quatre chemins pour expliquer ce qu’est effectivement le nouveau cinéma israélien de ces dix dernières années (et rassurez-vous, Ari Folman et son Bachir sont de la partie).
Après un premier ouvrage paru en 1997 à L’Harmattan, Le Cinéma israélien de la modernité, Ariel Schweitzer…
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Le numéro trimestriel de la revue du court métrage Bref consacre une partie à Chris Marker : Les constellations de Chris Marker. Un dossier passionnant sur la plupart de ses films.Jacques Kermabon ouvre l'ensemble des pages consacrées au mystérieux Chris Marker (de son vrai nom Christian François Bouche-Villeneuve), sorte d'éminence grise du cinéma puisqui'il refusait d'apparaître, d'accorder des entretiens, et interdisait la projection de certains de ses films.
Photographe, voyageur-cinéaste-essayiste, Marker travaille l'histoire et a été habité par elle. Pas comme la commémoration d'un passé patrimonial, mais comme la reprise de ce…
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Pour des raisons qui nous échappent, le numéro 86 de la revue Trafic a été indisponible sur le marché des librairies bruxelloises. Refusant, par éthique, de passer par le capitalisme sauvage du site Amazone (défiscalisé en Europe via le Luxembourg, avec des employés renvoyés s'ils adhérent à un syndicat, etc.), nous avons donc attendu. Commandé à Paris, il est arrivé, après une longue attente. On vous parle, dans ce webzine, du numéro d'été de la revue trimestrielle fondée par Serge Daney.
Tourneur
Démarrons avec Jacques Tourneur dans une conversation qui s'est déroulée entre Pedro Costa, cinéaste lisboète,…
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Né à Bruxelles, Frédéric Sojcher, revendique la part onirique et décalée de sa belgitude. Il aime et s'amuse du bon sens (bonhomme) et du côté intempestif de son pays. Réalisateur de Cinéastes à tout prix (2004) et Hitler à Hollywood (2011), professeur de cinéma à l'université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, il a aussi publié une sorte de bible : La Kermesse héroïque du cinéma belge (3 tomes) ainsi qu'un excellent Manifeste du cinéma et autres nombreux livres. Ce surdoué hyperactif écrit : « L'amour du cinéma, c'est l'amour des choses que l'on… Lire l'article
Le dossier de ce numéro est consacré à Wang Bing, le cinéaste chinois plus proche, comme Jia Zhang-Ke, du documentaire que la génération précédente (la cinquième dont les réalisateurs les plus connus sont Zhang Yimou et Cheng Kage).
Son premier film, À l'Ouest des rails, est une gigantesque fresque de 9h30, tournée dans les ruines d'une ville-usine maoïste, filmée avec une petite caméra DV.
Ensuite, le cinéaste a tourné un documentaire intitulé Fengming, chronique d'une femme chinoise (3h06) et Le Fossé (1h49), une fiction.
Jean-Louis Comolli avoue ne pas être parvenu à écrire une véritable critique de ce film fleuve.…
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Le numéro de juillet-août de Positif consacre un numéro spécial au néoréalisme : précurseurs, protagonistes et héritiers.
Le néoréalisme, mouvement cinématographique né en Italie, a bouleversé une conception du cinéma, en Europe, basée sur la littérature et la peinture. « Le néoréalisme est le moment le plus précieux de l'histoire du cinéma », dit Martin Scorsese.« En dehors du fil rouge de la dramaturgie héritée de D.W.Griffith, Rossellini a changé le cinéma en restant le nez collé sur la durée des choses et des êtres, dans le suspens des sens (...), une façon…
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L’an Demy
Cette année 2012 s’est déroulée sur les accents enchanteurs et les couleurs sardanapalesques du grand Jacques Demy. Rétrospectives, édition DVD de l’œuvre intégrale, restauration de films, exposition à la Cinémathèque française. Dans cet élan remarquable, le printemps a vu fleurir un livre consacré à un film qui ne fait pas l’unanimité : Une chambre en ville, mélodrame chanté réaliste autant qu’artificiel, trivial autant que lyrique.
En 1964, avec Les Parapluies de Cherbourg, Demy osait le premier film intégralement chanté, avec pour slogan : « En musique, en couleurs, en-chanté ».…
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Archives et documentaires
« Le film aide à la constitution d'une contre-histoire, non officielle, dégagée pour partie de ces archives écrites qui ne sont souvent que la mémoire conservée de nos institutions. »
Marc FerroDeux façons de traiter les archives parmi d'autres
Le cinéma, à travers l'explicite, de la fiction au documentaire, permet, comme le souligne Marc Ferro, d'atteindre l'implicite, autre chose que les archives écrites. Au cinéma, la fiction se sert souvent de l'histoire pour la résumer à partir de faits réels (Le cuirassé Potemkine, Les Sentiers de la gloire ou Il faut sauver le soldat Ryan). Le documentaire a d'autres…
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Central(e) Godard
Bref, la revue des courts métrages de cinéastes dont certains vont passer au long, favoriser l'émergence de jeunes cinéastes et les faire dialoguer avec leurs aînés, est, pour ces raisons, une revue passionnante. Le numéro 107 de Bref sort un dossier sur Jean-Luc Godard. Ceux qui l'aiment et ceux qui le détestent. Chacun ses arguments. Monsieur Jean-Luc dialogue avec les uns et avec les autres lors de quelques entretiens imaginaires. Michel Chion intitule son article Une façon de ne pas aimer Godard. On y découvre que Chion a écrit aux Cahiers du cinéma (1981-86) une revue de godardolâtres avec, comme seul film pendant cette période qui lui ait plu, Je vous salue Marie,…
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