Under Construction de Jorge León
Vues de chantiers à Bruxelles. Sur les toits d'une ville en construction permanente, commence le récit d'un homme. Arrivé en Belgique, ce jeune Egyptien soudeur se retrouve englué et puis prisonnier d'un patron véreux qui va l'exploiter plusieurs années durant sur divers chantiers. Sans-papiers, il est facilement abusé et maltraité. Jorge León rend compte de cette trajectoire tragique avec puissance. La voix off reprend la déposition faite par cet homme à l'inspecteur social de l'office national de sécurité sociale. Afin de laisser cette voix percer et ce récit se mettre à jour, le cinéaste a choisi de filmer des images de chantiers; des murs de béton troués, monstres muets et immobiles, un porte murée disant l'échappatoire impossible, ou les plastiques comme linceuls abandonnés. L'absence de corps dans la mise en scène permet l'épanouissement et l'imprégnation des violentes émotions induites par ce récit du désespoir et de l'aliénation. Mais la colère sourde et froide vibre au fur et à mesure de ces plans de marteaux tels des statues, outils de construction et de destruction. Et elle éclate dans cette incroyable séquence où pour la première fois, le corps apparaît via des mains qui frappent des morceaux de bois, alors que le récit dit le début d'une possible émancipation. Programmé au Festival International de Cinéma de Marseille 2021, Under Construction est direct et sans fioritures. Évidemment nécessaire.